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Ces mesures ne suscitent guère d'enthousiasme dans les différents camps. " Cette interdiction est bien trop drastique. Elle ne tient pas compte des années d'expérience sur le terrain. Et mésestime totalement le rôle de conseiller du pharmacien lors du choix des médicaments en vente libre ". Certaines entreprises ont d'ailleurs déjà introduit une plainte auprès du Conseil d'Etat. Table ronde La semaine dernière, l'association de pharmaciens KAVA décidait d'organiser une table ronde sur la question, pour demander à ce que le 'terrain' soit enfin entendu. " Les études sur lesquelles se basent les recommandations actuelles concernent surtout la situation américaine. Elles ne tiennent pas compte du système typiquement belge, où un pharmacien universitaire suit le patient et le conseille lors de la délivrance d'un antitussif ", écrit le Professeur Theo Lescrinier, de l'Université d'Anvers. Preuves bancales A la demande de l'Association BACHI, Lies Leemans - Professeur en Pharmacothérapie des produits d'automédication à la VUB et General Manager de le société de communication médicale aMACE - a analysé de plus près les études ayant motivé la décision de l'AFMPS. Ses conclusions ne laissent planer aucun doute. " Les études mentionnées ont trait essentiellement à des préparations qui ont disparu depuis longtemps du marché belge. Les quelques cas de toxicité relevés concernent en outre des nourrissons pour qui les antitussifs ne sont de toute manière pas indiqués. En cas d'usage correct, il n'existe aucun problème de sécurité signalé chez les enfants de plus de 2 ans. De plus, l'argument soulignant que les sirops contre la toux empêcheraient le diagnostic de certaines affections est contredit dans différentes études ", précise le Professeur Leemans. Monde académique Le monde académique appelle aussi à revoir cette décision. Mais le courrier de contestation envoyée l'année dernière par les universités d'Anvers et de Louvain à l'AFMPS est restée lettre morte. " L'AFMPS avance qu'il y a trop peu d'évidences au niveau efficacité. C'est aller un peu vite en besogne. On dispose de trop peu d'études qui répondent aux normes strictes d'evidence based. Logiquement, ces substances sont présentes depuis des décennies sur le marché. La plupart des études d'efficacité datent des années '60 et '70, du temps où les études cliniques étaient bien moins strictes. Mais de là à dire qu'elles sont sans valeur, c'est un peu rapide. "Etude de sécurité" L'evidence based est importante, mais tout autant que l'expérience sur le terrain ! Et comme le prouvent des années d'expérience, il n'y a jamais eu aucune plainte sur la sécurité. Le raisonnement de l'AFMPS qu'un enfant avec une toux sèche doit aller chez le médecin, parce que ce symptôme peut cacher un problème d'asthme ou de reflux, ne tient pas la route. D'après la littérature citée par l'Agence, il semble en effet que la toux sèche est banale et temporaire dans la majorité des cas. La prise d'un sirop antitussif pendant quelques jours peut parfois aider à mieux dormir la nuit. Les pharmaciens savent - sur base des questions orientées (WHAM) - quand ils doivent renvoyer le patient vers le médecin. Renvoyer chaque enfant présentant une toux sèche vers un généraliste entrainerait un excédent de travail dans les cabinets médicaux. Sans compter le coût supplémentaire pour le gouvernement. "Rôle du pharmacien Quel rôle le gouvernement entend-il confier à l'avenir aux pharmaciens dans le cadre de la délivrance de produits OTC ? " Nous aimerions le savoir ", répond le KAVA. " C'est une mauvaise stratégie de soumettre à prescription des médicaments dont on semble soudainement douter. Les confusions ne seront pas davantage éclaircies. Les patients continueront à demander des produits contre la toux. Si nous ne pouvons plus les délivrer pour les enfants, il est fort probable que certains adultes choisiront de leur administrer un sirop dont la notice ne fait mention d'aucune posologie pour enfants. "