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C'est un fait : la politique du gouvernement et de Laurette Onkelinx vis-à-vis du médicament ne fait pas que des heureux dans le secteur. L'industrie de recherche se plaint de façon récurrente d'être le vilain petit canard, à l'origine de dépenses évitables. Le médicament en tant que tel n'a plus la cote dans l'opinion. La ministre Onkelinx qui est considérée sur sa gauche comme trop favorable à l'industrie pharmaceutique n'a pas nié que le secteur conserve une assez mauvaise presse. Ce qu'elle déplore tout en conseillant à Big Pharma de travailler son image, ce qui de la part d'une experte en la matière est certainement un conseil à suivre. Elle a ensuite abordé les sujets qui fâchent dans une ambiance bon enfant mais néanmoins franche. Substitution A la question de savoir si d'autres étapes sont prévues en matière de substitution, la ministre et sa conseillère Anne Hendrickx ont été catégoriques : c'est non, en tout cas, dans le mandat imparti par Onkelinx, à savoir " 2014 au maximum ". En outre, la mesure a fait l'objet d'une loi qui, généralement, se change plus difficilement qu'un arrêté. La ministre a-t-elle été un peu empressée à prendre la mesure concernant les antimycotiques et les antibiotiques ? Laurette Onkelinx est consciente qu'il s'agit, dans la culture belge, d'une mesure forte qui a pu déstabiliser certains acteurs. C'est pourquoi elle s'en est tenue aux deux classes précitées. " Ce que j'ai entendu de l'industrie, c'est la peur que de petites firmes viennent s'introduire dans le processus pour casser les prix. " Trois corrections ont donc été prises : un arrêté royal prolonge la règle des trois médicaments minimums pour chaque prescription substituable ; un arrêté ministériel met de l'ordre dans les médicaments qui figurent fictivement dans le trio substituable alors qu'ils ne sont pas réellement disponibles. En outre, après avoir entendu les doléances des pharmaciens sur la difficulté d'application de la mesure, la ministre a prévu l'exception du cas de force majeure empêchant la substitution. Le pharmacien peut alors agir au mieux pour le patient. Enfin, les services de la ministre vont examiner comment les firmes peuvent rester dans la fourchette pour faire partie du choix du pharmacien. " Entre-temps, nous avons pu constater quelques diminutions de prix ", précise, sibylline, la ministre. Vision à long terme L'industrie de recherche qui pense aux dix ans nécessaires pour le lancement d'une molécule est très attentive, a-t-on entendu, à de bonnes conditions d'investissement et l'étranger qui regorge à cet égard de " pays compétitifs ". La ministre a rappelé l'existence de la taxe pharma mais a surtout insisté sur le plan de relance qu'elle rêve de voir concrétiser par l'actuel gouvernement et qui mettra le paquet sur l'innovation. A cet égard, la ministre enjoint l'industrie à rassembler ses propositions qu'elle lira volontiers. Mais, de fait, en nombre de brevets, souligne-t-elle, la Belgique est fortement à la traîne en dépit de l'existence de nombreux chercheurs : la balle est donc dans le camp de l'industrie. Formation des chercheurs Justement, la Belgique est-elle une terre de chercheurs ? Dans l'absolu oui, sauf que notre pays n'en forme pas assez, souligne un dirigeant de GSK, notamment en fédération Wallonie-Bruxelles. La ministre acquiesce, précisant qu'on forme par contre des universitaires dont on sait à l'avance qu'ils n'auront pas de débouchés. Selon Onkelinx, le Premier Elio Di Rupo (lui-même chimiste) a mis ce sujet sur la table du gouvernement fédéral. Les filières scientifiques, dès le secondaire d'ailleurs, ne sont pas suffisamment encouragées. A cet égard, la ministre s'est dite ouverte a priori à l'instauration de chaires universitaires en pharmacologie financées par l'industrie pharmaceutique, sous condition d'un solide cahier des charges pour en garantir complètement l'indépendance. La ministre est ouverte à l'idée que, si à un moment donné, une firme a des difficultés à l'exportation, on peut envisager un report de la baisse de prix, histoire d'engranger provisoirement des budgets supplémentaires. Bouc-émissaire Quatre milliards pour le médicament mais à peine moins pour le secteur hospitalier. Un représentant d'un laboratoire souligne qu'on demande toujours des efforts aux mêmes, alors que, comme l'a révélé un rapport de l'Agence intermutualiste, les hôpitaux belges ont la main assez lourde en matière d'imagerie médicale. La conseillère de la ministre a soufflé que c'était de moins en moins le cas. Des efforts sont demandés à tous les secteurs. Les nouveaux médicaments pris en charge par la sécu sont de plus en plus chers. La sécu remplit son rôle d'investissement dans l'innovation. Par ailleurs, la norme de croissance des soins de santé a été strictement limitée en 2012, mais elle pourra ensuite reprendre une progression plus normale de 3 %.