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L'étude menée par l'Institut de Duve (UCLouvain) s'est penchée sur la littérature relative à la résistance et à la résistance croisée des micro-organismes à certaines substances actives biocides. "La résistance aux antimicrobiens est un problème mondial croissant qui pourrait devenir incontrôlable si aucune mesure n'est prise pour empêcher sa propagation. Si l'on s'est surtout intéressé au développement de la résistance après l'utilisation d'antibiotiques, on sait beaucoup moins comment les micro-organismes développent une résistance après l'utilisation de produits biocides. Une préoccupation majeure est que les micro-organismes qui survivent à l'exposition à un produit biocide développent des mécanismes de résistance qui assurent également une protection contre les antibiotiques utilisés pour traiter les infections humaines", indiquent les auteurs de cette étude le Pr Jean-François Collet, Antoine Delhaye et Pauline Leverrier. Ces chercheurs ont ciblé les alcools, les composés à base d'aldéhydes, le peroxyde d'hydrogène, l'acide peracétique, la chlorhexidine, les composés d'ammonium quaternaire, les composés libérant du chlore et acides organiques faibles. Ils ont aussi évalué le triclosan, non autorisé dans l'UE. "Ce rapport se concentre sur les bactéries, car elles font l'objet de la grande majorité des études sur la résistance aux biocides. Les données disponibles sur les mycobactéries, les levures et les moisissures ont été incluses lorsqu'elles étaient disponibles. Étant donné que les virus ne se répliquent (et ne mutent) qu'à l'intérieur de l'hôte, il est très peu probable qu'une résistance se produise après une désinfection avec un produit biocide. Par conséquent, aucune donnée sur ce sujet n'a été trouvée dans la littérature".Résultats? "Après avoir analysé la littérature pertinente, nous avons constaté qu'il existe un grand nombre de données qui soutiennent un rôle des produits biocides dans l'émergence de la résistance aux antimicrobiens, mais l'importance de ce rôle dépend largement du type de produit biocide, du micro-organisme affecté et de la méthode et du contexte dans lesquels le produit biocide a été utilisé", expliquent-il.En détail:-les alcools, le peroxyde d'hydrogène, l'acide peracétique et les acides organiques faibles constituent un risque très improbable de développement d'une résistance suite à leur utilisation;-les produits à base d'aldéhyde et les agents de libération de chlore constituent un risque improbable;-la chlorhexidine et les composés d'ammonium quaternaire constituent un risque probable et -le triclosan constitue un risque très probable. "Les micro-organismes concernés sont les bactéries à Gram positif et à Gram négatif, les mycobactéries et les levures. L'utilisation de la chlorhexidine, des composés d'ammonium quaternaire et du triclosan est principalement associée au développement d'une résistance croisée à d'autres antimicrobiens, notamment des antibiotiques tels que la tétracycline, la vancomycine, le chloramphénicol, la ciprofloxacine, l'imipénème et la colistine".Les auteurs recommandent de développer la recherche sur ce sujet, de mettre en place un programme de surveillance et de limiter, dans la mesure du possible, l'utilisation de produits biocides tels que la chlorhexidine, les composés d'ammonium quaternaire et le triclosan, qui sont associés au développement de la résistance et de la résistance croisée.2 astucesSelon le SPF Santé publique, "la résistance peut se développer lorsque le dosage ou le temps d'action du produit n'est pas respecté. L'usage très généralisé de certains biocides peut aussi permettre aux organismes résistants de prendre le dessus".En guise de prévention, il propose deux astuces: utiliser des biocides uniquement lorsque c'est nécessaire et de respecter le mode d'emploi. Ainsi, la prudence commence dès l'achat: "Pour nettoyer votre maison, utilisez un produit de nettoyage qui ne désinfecte pas. Optez pour un désinfectant uniquement lorsqu'il est nécessaire d'enlever des bactéries, virus, levures ou moisissures, par exemple si un membre de votre ménage est malade ou infecté par le coronavirus. Il est alors préférable de désinfecter encore plus certains éléments que vous touchez souvent, comme les poignées de portes, le robinet, les toilettes, les interrupteurs, la rampe d'escalier ou les tables (de chevet). N'oubliez pas que la plupart des produits désinfectants doivent être utilisés sur une surface propre. Il est donc souvent nécessaire de nettoyer d'abord la surface et ensuite de la désinfecter".Second conseil: respecter le mode d'emploi: "Utilisez la dose recommandée, laissez le produit agir un temps suffisant, suivez les instructions figurant sur l'étiquette et sur le mode d'emploi, aérez de manière suffisante, ouvrez les fenêtres, rincez ensuite à l'eau claire. Ceci est très important, surtout pour les surfaces ou matériaux sur lesquels vous posez de la nourriture ou des boissons, comme la table à manger".Le SPF invite à consulter le site " Lire avant utilisation " pour connaître tous les détails pratiques