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Ces dernières années, l'épidémiologie basée sur l'analyse des eaux usées a montré son utilité comme indicateur valable de l'usage des drogues. Une équipe internationale de chercheurs, le Groupe SCORE (Sewage analysis CORe group Europe, Groupe central d'analyse des eaux usées en Europe), a récolté des échantillons dans 143 stations d'épuration dans 120 villes de 37 pays, pendant une semaine, chaque année entre 2011 et 2017. Leurs résultats ont paru dans Addiction. L'objectif était d'évaluer les tendances géographiques et temporelles des charges en substances mères (amphétamines, methamphétamines et MDMA (Ecstasy)) et en métabolites de la cocaïne (benzoylecgonine) et du delta9-tétrahydrocannabinol (THC) (11-nor-9-carboxy-delta9-tétrahydrocannabinol), mesurées dans les eaux usées par chromatographie liquide et spectrométrie de masse. Il s'agissait ensuite de déterminer la consommation globale de drogues en estimant le nombre moyen de doses combinées consommées quotidiennement dans chaque ville et en le comparant aux données existantes sur la prévalence et les saisies de drogues (2011-2013 versus 2014-2017). En Europe, la benzoylecgonine (cocaïne) est le principal métabolite détecté dans le sud et l'ouest (Suisse, Italie, France, Espagne et Royaume-Uni, avec une forte hausse entre 2011 et 2017). Les amphétamines, méthamphétamines et MDMA sont très présents à l'Est et en Europe centrale. En Belgique et aux Pays-Bas, on a également observé une forte consommation de cocaïne et de méthamphétamine. Dans les autres continents, c'est la méthamphétamine qui arrive en tête aux États-Unis et en Australie et la benzoylecgonine en Amérique du Sud. Pour les auteurs, "l'analyse des eaux usées pour quantifier les taux de drogues donne des infos pratiquement en temps réel qui correspondent globalement aux données sur la prévalence et les saisies de drogues et confirme les grandes disparités de consommation à travers le monde". "L'expertise développée a également joué un rôle déterminant dans la conception et la réalisation du projet pilote sur la surveillance de la consommation de cannabis par l'analyse des eaux usées lancé par Statistique Canada en mars 2018 et visant à recueillir des données supplémentaires dans le contexte de la légalisation du cannabis", a commenté Viviane Yargeau (Université McGill).