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" Depuis le 15 mars, tout est passé en distanciel. Pour les cours théoriques, l'UC Louvain a mis les bouchées doubles pour maintenir l'enseignement et ne pas prendre de retard. Les équipes techniques ont fait des efforts considérables pour mettre à notre disposition des outils que l'on connaissait encore relativement mal, maintenant on jongle avec tout cela et on devrait atteindre 80 à 90% de continuité réelle de l'enseignement ", explique le Pr Emmanuel Hermans, doyen de la faculté de Pharmacie et des Sciences biomédicales à l'UCLouvain. A Woluwé, les professeurs ont privilégié l'enseignement en live, via l'outil Teams. Ces cours sont enregistrés et les podcasts mis sur une plate-forme consultable à volonté. " Les étudiants posent des questions via un chat et quand certains en likent une, je me dis qu'elle est vraiment pertinente et je prends quelques minutes pour y répondre. Je n'ai jamais eu autant d'interactions avec les étudiants ! La distance désinhibe et pourtant les messages ne sont pas anonymes ! La participation à ces cours est élevée, je crois qu'on a eu plus d'étudiants aux cours en virtuel que quand ils ont lieu en auditoire ! Bien sûr, certains étudiants ne sont pas contents et certains professeurs peu coopérants, mais de manière générale, cela se passe bien ", reconnaît-il. À Namur, à côté des cours ex cathedra donnés via Teams, d'autres sont donnés sur PowerPoint commentés par l'enseignant, avec possibilité pour l'étudiant de poser des questions via des forums. Si la partie théorique n'a pas posé beaucoup de soucis, il n'en va pas de même pour les travaux pratiques. Heureusement, quand ils ont dû s'arrêter mi-mars, une grande partie était déjà faite. Certains ont été maintenus à distance, d'autres remplacés par des travaux, mais pour certains comme la galénique il était difficile de trouver une solution. C'est pourquoi l'UCLouvain a décidé d'inviter les étudiants à venir faire des manipulations pendant la dernière semaine de juin : " Ils auront ainsi l'occasion d'expérimenter, à titre formatif mais aussi certificatif, des choses que l'on considère comme essentielles (préparations magistrales...) ". Cette année, les universités vont privilégier les examens à distance, ce qui permettra de respecter les agendas habituels. Les examens oraux se feront par vidéoconférence, comme les présentations de travaux et de mémoire, et les examens écrits par QCM et Qroc (questionnaire à réponses ouvertes et courtes). Conscientes du stress engendré par cette situation inédite, les universités ont organisé une semaine d'examens blancs pour que les étudiants puissent se familiariser avec cette nouvelle méthodologie d'évaluation. " Pour respecter le principe d'une évaluation équitable, il y a une nécessité de surveillance. On a mis en place un logiciel qui permet d'envoyer les questionnaires aux étudiants de façon mélangée afin d'éviter qu'ils ne partagent les réponses, et certains professeurs ont recours à une plateforme qui prend de temps en temps des photos des étudiants, dans le respect des règles du RGPD. L'idée est de les consulter a posteriori pour repérer les comportements douteux. Le système n'est pas capable de détecter tous les types de fraude, mais le but n'est pas de faire la chasse aux sorcières. Quoiqu'il en soit, les examens seront très probablement différents des autres années, les étudiants auront peut-être des copions, on ne peut rien y faire ", admet Emmanuel Hermans. " Les étudiants sont très inquiets, on essaye de les rassurer mais il est vrai que le confinement induit du stress et que les conditions de travail ne sont pas égales. C'est pourquoi l'Université met à disposition des locaux équipés d'ordinateurs pour passer les examens, selon les mêmes modalités qu'à la maison mais sous surveillance. Environ 5% des étudiants pourraient faire appel à ce service ". À Namur, une Commission de contact réunit les représentants des étudiants avec Jean-Michel Dogné (directeur du département de Pharmacie), le coordinateur pédagogique et la secrétaire pour ne laisser aucune question sans réponse et contrôler le stress. Le stage obligatoire de six mois en officine a généralement pu être préservé, même s'il se déroule dans des conditions particulières. " Les étudiants ont découvert l'officine en pleine crise, avec une pratique officinale considérablement modifiée ces derniers mois. Quant aux stages à orientation d'un mois, ils ne sont pas obligatoires et il était délicat de les maintenir pour des raisons de sécurité et d'accueil puisque de nombreuses entreprises étaient fermées ", indique le Pr Hermans. Autre victime du coronavirus, les échanges Erasmus qui ont tous été arrêtés ou supprimés. La question reste posée pour ceux qui doivent partir en septembre, les institutions universitaires réfléchissent aux modalités de la rentrée académique 2020. " Indépendamment de la crise, l'enseignement à distance se développe (mooc, podcast...). A cause du covid, en une semaine, on a fait un bond technologique qui aurait pris 5 ans sinon, souligne le Pr Hermans. Je suis convaincu que des séminaires ou des séances de questions-réponses pourraient continuer de se faire à distance, mais pas les cours : une enquête montre que les étudiants veulent du présentiel ". " Techniquement, des professeurs qui travaillaient encore à l'ancienne ont dû s'adapter. Cela va renforcer l'approche digitale de l'enseignement, néanmoins, les étudiants sont plus que jamais demandeurs d'enseignement ex cathedra ", ajoute le Pr Dogné. Enfin, comment organiser la remise des diplômes en présence des autorités académiques et des familles ? Pour l'instant, Emmanuel Hermans se pose la question : " D'habitude, la proclamation a lieu l'un des premiers samedis de septembre. On ne sait pas si on pourra rassembler 500 personnes voire plus dans un auditoire, mais on y tient. Je préférerais encore le faire avec un micro sur un terrain de foot que devant mon ordinateur ! Toute la vie étudiante a été mise sur le côté, toutes les activités sociales de la dernière année ont été annulées... On a paré à l'obligatoire académique et mais il y a un gros vide... "