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Comment limiter l utilisation à long terme des benzodiazépines et médicaments apparentés utilisés pour traiter l'insomnie ? Régulièrement, des études pointent du doigt les effets néfastes d'une prescription au long cours de ces substances : accoutumance et dépendance bien sûr, mais aussi risques de chute, de somnolence diurne, de troubles de la mémoire, de démence voire d'Alzheimer. Des campagnes de prévention sont donc organisées pour en limiter l'usage et l'abus, l'objectif étant de lutter contre la banalisation de leur consommation, notamment dans l'insomnie, trouble très répandu qui nécessite une prise en charge spécifique.Il y a un peu plus d'un an, le SPF Santé publique lançait une campagne intitulée " Somnifères et calmants, pensez d'abord aux autres solutions ", incitant à faire appel aux alternatives non-médicamenteuses en premier choix. Il rappelait alors que, " selon l'enquête de santé 2013 de l'Institut scientifique de santé publique, 13% de la population de plus de 15 ans a consommé un somnifère ou un calmant au cours des deux semaines qui ont précédé l'interview, un pourcentage qui augmente encore avec l'âge. Ainsi, chez les personnes âgées de 75 ans et plus, ce taux est d'environ 40% chez les femmes et 26% chez les hommes ".En décembre 2014, dans sa note de vision globale et plan d'action, la plateforme multidisciplinaire BelPEP (Belgian Psychotropics Experts Platform) rappelait que " chez un insomniaque, les benzodiazépines sont un second choix après l'approche non médicamenteuse. Pour les personnes âgées, elles sont à éviter. En règle générale, une évaluation doit être faite après une semaine ". Elle notait alors dans ses priorités de " réduire les emballages de benzodiazépines à un nombre réduit de comprimés "." Savez-vous qu'il existe des boîtes de moins de 30 comprimés de benzodiazépines et médicaments apparentés ? " Telle était l'une des questions posées par l'Agence des médicaments (AFMPS) aux médecins fin 2018. En effet, en 2011, elle s'est employée à limiter à un usage hospitalier la délivrance de grands conditionnements ou de formes spécifiques de conditionnement de certains produits dont les hypnotique et sédatifs. Pourquoi ? " Pour réduire le risque d'intoxication, accidentelle ou volontaire, et celui de dépendance, sans affecter la compliance au traitement ou le confort du patient ".Voilà pourquoi, depuis 2011, la taille du conditionnement pour la délivrance dans une officine ouverte au public est limitée à 30 comprimés par boîte pour les benzodiazépines et apparentés qui n'ont que l'insomnie comme indication (pour celles qui ont d'autres indications, la taille des boîtes est limitée à 60 comprimés).Depuis septembre dernier, l'AFMPS et le SPF Santé publique ont proposé aux firmes pharmaceutiques d'élargir l'offre des petits conditionnements permettant une durée de traitement de moins d'un mois. " En effet, dans le cadre des troubles du sommeil, on constate une réduction de l'efficacité des benzodiazépines et apparentés à partir d'une semaine et la possibilité d'une dépendance physique et psychologique à partir de deux semaines d'utilisation ".Médecins et pharmaciens sont-ils bien au courant de ces modifications ? Pour le savoir, en octobre 2018, la division Vigilance de l'AFMPS a mené une enquête en ligne auprès des médecins afin de connaître leur avis sur l'utilité de ces petits conditionnements. Parmi les plus de 1400 médecins qui ont répondu (55% de généralistes), 80% connaissaient leur existence, 70% en prescrivaient et 83% estimaient qu'ils étaient utiles pour limiter le risque d'abus et de dépendance.Ensuite, en mars 2019, l'Agence a sondé l'avis de 365 pharmaciens titulaires. Au cours des trois mois précédant l'enquête, 80% ont reçu au moins une prescription pour un tel petit conditionnement (boîte de 10 à 20 comprimés), mais 43% n'avaient pas pu délivrer immédiatement le volume prescrit. Cependant, au moment de répondre au questionnaire, 91% en avaient en stock.Quant à l'utilité de ce genre de conditionnement, comme les médecins, les pharmaciens considèrent qu'ils sont utiles pour limiter les risques d'abus de dépendance, en particulier chez les nouveaux utilisateurs et les utilisateurs occasionnels. Ils se sont montrés plus mitigés concernant les utilisateurs chroniques en cours de sevrage." L'offre actuelle de petits conditionnements devrait être élargie pour permettre aux pharmaciens de répondre rapidement à la demande du patient en respectant la prescription du médecin ", conclut l'AFMPS.