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" On a un peu avancé le service sevrage benzodiazépines/ z-drugs parce qu'on voulait éviter de lancer deux services en même temps. La Revue de médication, prévue pour avril, est un peu complexe à développer d'un point de vue informatique et nécessite un peu plus de temps. C'est la raison pour laquelle on a décalé les deux services", précise Nicolas Echement, porte-parole de l'APB. Ce sevrage s'adresse aux patients en ambulatoire, sur démarche volontaire, qui prennent une benzodiazépine/ z-drug depuis au moins 3 mois pour traiter une insomnie, à une dose maximum de 3 DDD (Defined Daily Dose, dose quotidienne définie). Le Plan de sevrage est fait en tripartite entre le patient, le médecin et le pharmacien. Le médecin prescrit les préparations magistrales, selon différents schémas (par exemple, en 5 paliers avec une réduction de 20% des doses, un palier dure 30 jours) et pour une durée maximum d'un an. "Il est possible d'avoir une prolongation d'un palier pour stabiliser un peu la situation et de suspendre le programme dans divers cas, notamment une hospitalisation". Le pharmacien peut faire deux entretiens avec le patient (22 ?/entretien): un premier qui aboutit au contrat tripartite sur le sevrage aux benzos et le deuxième à la fin du programme. Le patient doit acheter sa boîte de somnifère habituelle et la préparation des magistrales est remboursée. "Au départ, commente-t-il, l'idée était d'avoir un peu plus que deux entretiens remboursés, parce qu'on se rend compte, aussi bien dans le tabac que pour ce genre de drogue, que le patient a besoin d'être soutenu de l'extérieur pour optimiser son sevrage. Si le pharmacien en fait plus, c'est tout à son honneur." "Il s'agit toujours d'un projet pilote qui sera évalué après un an, fait-il observer. Il a été accepté pour une durée de un an et, en fonction de son évaluation et de son succès ou non, les politiques détermineront la suite." Le succès de cette entreprise est bien sûr conditionné par les moyens en place. Première limite: le budget octroyé à ce Plan sevrage est très restreint. "il s'élève à 150.000 ?, ce qui correspond à 1500 patients, souligne Nicolas Echement. Or, on estime à 200.000 le nombre de personnes sous benzodiazépines en Belgique... Si ce sevrage a du succès, l'évaluation et la discussion se feront évidemment avant la fin de l'année, pour savoir si on continue et dans quelles conditions." "C'est un projet auquel croit aussi bien notre secteur que celui des médecins. Pour le lancer début février, nous en ferons la promotion avec les syndicats médicaux qui le souhaitent. On essaye aussi de faire beaucoup de concertations avec les médecins. C'est d'ailleurs un projet pour lequel la Société scientifique des pharmaciens francophones (SSPF) a développé, en collaboration avec la SSMG, un programme de concertation médico-pharmaceutique. Pour faire de ce Plan de sevrage un succès, il faut que le tandem médecin/pharmacien fonctionne et que les médecins soient mis au courant de cette possibilité, parce que, souvent, ils ne savent pas ce qu'ils peuvent prescrire à leurs patients et passent ainsi à côté d'une opportunité." Des formations sur le sevrage aux benzodiazépines à destination des pharmaciens sont organisées par la SSPF. "Cette année, l'autre gros projet sera la revue de médication: on doit vraiment y être formé correctement et pouvoir maîtriser les outils de façon poussée. La formation est donc beaucoup plus conséquente que pour les benzos", ajoute-t-il. Selon l'enquête menée par l'AFMPS en 2020 sur l'utilisation des benzodiazépines et substances apparentées dans le cadre des troubles du sommeil, la majorité des patients concernés étaient en situation de mésusage et 75% souhaitaient pouvoir arrêter leur traitement, 67% déclarant avoir tenté de l'arrêter. "On sait que beaucoup de personnes souffrent de la dépendance aux benzodiazépines et aux z-drugs. En fait, c'est toujours le problème de soigner les effets immédiats d'une cause sous-jacente qui n'est pas prise en charge au départ. Si on utilise des benzos, c'est pour 'calmer les gens' qui souffrent en fait d'autre chose de plus profond. C'est aussi toute la problématique de la prise en charge de la santé mentale en Belgique." "Malheureusement, regrette-t-il, avec ce projet, on ne va toucher que la pointe de l'iceberg. Cependant, si on le met en place, c'est aussi pour lutter contre les effets indirects des benzodiazépines, à savoir tout ce qui est lié aux accidents, à la perte de connaissance... Ce sevrage existe déjà de manière ponctuelle mais, ici, l'idée est d'offrir cette possibilité à tout le monde et de permettre au patient de demander de l'aide pour arrêter ses benzos." L'arrivée de ces nouveaux services se fait dans un contexte de tensions multiples et notamment des pénuries de médicaments et de pharmaciens. "Cette année, on veut stabiliser les nouveautés. Depuis 2 ans, on développe des nouveaux services et des nouvelles activités pour le pharmacien et on veut que nos collègues puissent les mettre de manière sereine en place dans leurs officines, sans être pressés par d'autres nouveaux services à venir. On veut aussi se concentrer sur la fonction de pharmacien de référence parce que, pour nous, ça reste la base de cette nouvelle approche de la pharmacie vis-à-vis du patient. Pour pouvoir faire ces nouveaux services, le pharmacien a besoin de temps, de personnel, et ne pas passer son temps à chercher des solutions pour des indisponibilités etc. C'est difficile d'agir là-dessus, il faut essayer de travailler sur des approches plus indirectes et voir pourquoi ces pénuries existent encore", insiste Nicolas Echement. Quoiqu'il en soit, le prochain rendez-vous est fixé en avril pour la revue de médication.