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Depuis plusieurs mois, la pénurie de certains médicaments en officine agace les patients, les médecins et les pharmaciens. " Il n'y a pas de solutions simples pour résoudre ce problème ", commente Joris Van Assche, managing director de Medaxes. " Il faut mettre en place une approche visant la collaboration entre les acteurs. Plusieurs facteurs jouent dans ce dossier, dont la politique générale du médicament, les mécanismes de taxation et les volumes qui peuvent être mis sur le marché. Parfois, une entreprise belge remue ciel et terre pour mettre de nouveaux médicaments génériques sur le marché mais si le contexte économique belge n'est pas favorable, ces médicaments seront en vente à l'étranger mais ne seront pas disponibles ici. "Pour Medaxes, il est capital de mieux informer les médecins. " Pour 80% des indisponibilités, des alternatives génériques existent. Souvent le prescripteur ne le sait pas. Les informations doivent être centralisées. Nous avons soutenu la création de la nouvelle plateforme en ligne PharmaStatut (qui permet depuis décembre 2019 aux firmes pharmaceutiques de communiquer sur l'indisponibilité des médicaments en Belgique depuis, ndlr). Notre secteur a été très loin dans la transmission des données et la transparence. L'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé a fait du bon travail. Pour poursuivre dans cette voie, il faut que tous les logiciels tant ceux utilisés par les médecins que les pharmaciens, soient connectés en temps réel à PharmaStatut. C'est primordial. Nous allons insister auprès du prochain gouvernement fédéral pour que cela se fasse. Cette mise en commun des informations va réduire le risque de prescription des médicaments indisponibles. "Quid de la substitution pour résoudre le problème de l'indisponibilité ? L'Association pharmaceutique belge (APB) et le GBO estiment que "le pharmacien a un droit de substitution dans le cas strict de pénurie d'un médicament." L'Absym a déclaré récemment être contre une substitution systématique.Medaxes n'est pas opposée à la substitution pour les pharmaciens lorsqu'un médicament n'est pas du tout disponible. " Cette substitution doit être bien définie dans un arrêté royal qui détermine les critères d'indisponibilité. Par contre, nous nous opposons totalement à un droit de substitution généralisé. La problématique de l'indisponibilité ne peut pas être un prétexte pour introduire la substitution généralisée. " Joris Van Assche avance deux arguments. " Le premier est médical, la substitution des médicaments augmente le risque d'une utilisation erronée du médicament, surtout chez les patients âgés, polymédiqués. Le deuxième argument est économique. Si le pharmacien a un droit de substitution généralisé, il aura le pouvoir de choisir un producteur en fonction de la ristourne qu'il aura négocié. C'est une vision à court terme au niveau sociétal. Tôt ou tard ce mécanisme cassera parce que les ristournes, par définition, sont opaques. Elles ne reviennent ni à l'assurance maladie, ni aux patients. "Pour Medaxes, le problème de l'indisponibilité des médicaments doit s'inscrire dans une réflexion plus large sur la politique d'accès aux médicaments." Le nouveau gouvernement devra faire des choix politiques au niveau de la politique du médicament. Pour l'ensemble du budget des soins de santé, il faudra au minimum une norme de croissance de 2%. Elle ne doit pas s'appliquer linéairement. On peut prévoir évidemment des variations intersectorielles ", estime Joris Van Assche. " Ces dernières années le budget du médicament a été gardé sous contrôle, hormis le sous-secteur du budget des médicaments délivrés à l'hôpital pour les soins ambulatoires. Cette croissance est liée entre autres aux médicaments qui relèvent de l'article 81. Ce mécanisme de financement a sauvé des vies. Il ne faut pas le balayer d'un revers de main. Par contre est-ce que c'est une solution idéale sur le long terme ? Il faut trouver un nouveau terrain d'entente pour négocier ces contrats. C'est aux politiciens de se prononcer sur les contours d'un nouveau système. "Medaxes estime qu'il faut également revoir le système des taxes dites de claw back imposées sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques. " Une grande partie de cette taxe n'alimente pas le budget des médicaments mais le budget des soins de santé. Pour le secteur des génériques et des biosimilaires, cela correspond à une marge de quelques dizaines de millions d'euros que nous ne pouvons pas utiliser pour l'introduire dans le jeu du marché et de la concurrence. Or, nous ne sommes pas responsables des dépassements des autres sous-secteurs du budget du médicament ", explique Joris Van Assche.Pour le managing director de Medaxes, il est temps de rediscuter du fondement du Pacte d'avenir qui a été signé entre l'industrie pharmaceutique et Maggie De Block en 2015. " Il reposait sur le principe que l'innovation allait être financée par les économies réalisées dans le secteur du post-brevet. Ce n'est plus tenable. C'est un constat qui est fait également au niveau international. Le coût de l'innovation est trop important par rapport aux économies qui peuvent être réalisées. Il faudra trouver avec le gouvernement un nouvel accord. Durant des années, notre secteur a été instrumentalisé comme un pied de biche pour réaliser des économies, sans toutefois lui accorder le volume qui devrait lui permettre d'opérer durablement. " Selon Medaxes, si le système ne change pas, certains médicaments génériques ou biosimilaires ne seront pas vendus en Belgique.Des mesures ont été prises récemment par les autorités. L'Inami a créé un groupe de travail qui sous la responsabilité de Jo De Cock, l'administrateur général de l'Inami, va chercher des mesures concrètes (dont l'information pour les médecins, l'adaptation des marchés publics...) pour augmenter la part des biosimilaires en Belgique.La politique générale du médicament, les mécanismes de taxation et les volumes qui peuvent être mis sur le marché sont des facteurs qui influencent la disponibilité des médicaments dans les officines.