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Les IPP font partie des cinq médicaments les plus prescrits. " En 2022, les deux IPP les plus prescrits ont coûté 92 millions d'euros à l'assurance maladie, pour un total de 388 millions de doses ", relève le Pr Jan Tack, chercheur principal de l'étude PEPPER et chef du service de Gastro-entérologie de l'UZ Leuven. " Si on peut en partie lier cela à l'efficacité de ces médicaments. " le Pr Jan Tack ajoute néanmoins quelques remarques: - Les IPP sont disponibles en fortes et faibles doses. Les doses élevées sont prescrites en début de traitement pendant 1 à 2 mois maximum pour être ensuite remplacées par des doses plus faibles en traitement d'entretien. Toutefois, environ 30% des patients traités prennent une dose élevée de manière chronique. - Un groupe d'experts de l'Inami a estimé en 2018 qu'entre 39% et 63% de l'utilisation chronique des IPP n'est pas indiquée. " Ceci explique d'une part, le coût global élevé lié à l'utilisation des IPP, mais cela soulève d'autre part la question des interactions médicamenteuses liées à ces médicaments qui sont principalement prescrits chez les personnes âgées ", commente le Pr Tack. " Il s'agit de très petits groupes de patients ", précise le Pr Tack. " Les patients atteints d'oesophagite de haut grade ou d'oesophage de Barrett représentent moins de 10% de la population souffrant de reflux. Pour tous les autres patients souffrant de reflux ou de dyspepsie, un traitement d'attaque est recommandé comme suit: 4 à 8 semaines de traitement avec un IPP, puis essayer d'arrêter. " Les patients qui passent à l'utilisation chronique d'un IPP en l'absence d'indication médicale, le font parce que leurs symptômes réapparaissent après l'arrêt du médicament. Cela s'explique par le fait que la production d'acide dans l'estomac est stimulée par les cellules de la paroi gastrique qui produisent la gastrine. Lorsque la production d'acide est chroniquement supprimée par l'utilisation d'un IPP, ces cellules deviennent hyperactives. Tant que le traitement est en cours, cela reste sans conséquence. Mais lorsqu'on arrête l'IPP, l'augmentation de la sécrétion de gastrine pendant une dizaine de jours entraîne une production d'acide plus importante que jamais, ce qui peut rendre les symptômes liés à l'acidité plus sévères qu'avant l'initiation du traitement. " Une étude scandinave a montré qu'après 8 semaines d'utilisation d'un IPP par des volontaires en bonne santé, 30% de la population se plaignait de problèmes d'acidité après l'arrêt du traitement ", souligne Jan Tack pour illustrer ce mécanisme. En absence de consensus sur les stratégies efficaces pour arrêter un IPP. La littérature mentionne principalement trois pistes: 1. Le passage à un antiacide qui semble efficace, mais ces médicaments ne sont plus disponibles en Belgique. 2. Une utilisation temporaire d'un alginate qui a également montré des résultats extrêmement favorables dans une étude caractérisée par un long suivi. " Il s'agit probablement d'une bonne option pour les patients souffrant de reflux, mais par pour les patients souffrant de dyspepsie ", nuance le Pr Tack. " Or, on estime que les patients souffrant de dyspepsie représentent la moitié des utilisateurs chroniques d'IPP. "3. La diminution progressive de la dose d'IPP, en commençant par remplacer la dose élevée par une dose faible. Après environ 4 semaines, il est recommandé de poursuivre la diminution en suivant un schéma intermittent tel que: 1 dose/ jour pendant une semaine, puis 1 dose tous les 2 jours pendant une semaine et enfin 2 doses/semaine pendant une semaine pour arriver jusqu'à un arrêt complet. " L'Inami recommande cette stratégie, mais nous disposons de très peu de données pour la soutenir. Un travail de fin d'études réalisé par des médecins généralistes de l'université de Gand a révélé un taux de réussite d'environ 20%, ce qui paraît faible par rapport aux taux de réussite de 30 à 40% rapportés dans la littérature pour les autres stratégies. " commente Jan Tack. Une variante de cette stratégie de suppression progressive est l'utilisation à la demande: le patient interrompt la prise systématique et n'utilise une ou plusieurs doses qu'en cas de réapparition des symptômes, et arrête à nouveau dès qu'il est soulagé. Au bout d'un mois, les prises sont complètement supprimées. Afin d'éclaircir ces pistes, le groupe de recherche TARGID de la KU Leuven a mis en place l'étude PEPPER (Primary carE PPi dEprescRibing) chez des patients de la première ligne qui prennent un IPP de manière chronique (au moins depuis trois mois), sans indication stricte pour celui-ci. L'étude se déroule avec le soutien du KCE et la collaboration de tous les centres universitaires de médecine générale du pays. Le nombre de patients visé est de 750. Les patients sont randomisés dans l'une des stratégies suivantes, sur une période d'un mois: 1. passage à un alginate + arrêt, 2. abandon progressif + arrêt, 3. passage à l'utilisation à la demande + arrêt. Le suivi dure un an. L'étude vise principalement à identifier la stratégie la plus efficace des trois et à cerner le profil des patients susceptibles de réussir un arrêt. Dans cette optique, toute une série de paramètres sont enregistrés, tels que l'indication initiale de l'utilisation des IPP, l'âge, le sexe, le profil des symptômes pendant la phase d'interruption, le taux de gastrine dans le sang, l'anxiété et la dépression (qui compliquent l'arrêt du traitement), l'indice de masse corporelle et les éventuelles comorbidités. Selon Jan Tack, " il est possible que l'étude révèle un profil de patient pour lequel l'interruption complète du traitement par IPP échoue. Dans la pratique clinique, nous constatons que plus de la moitié des patients atteints d'oesophagite de bas grade rechutent après la guérison initiale des lésions. Même chez les patients souffrant de reflux non érosif, les symptômes réapparaissent parfois après une rémission. Toutes ces personnes dépendent de l'utilisation d'un IPP à long terme pour avoir une bonne qualité de vie. " " Un suivi d'un an est ambitieux, mais s'il permet de révéler la meilleure des stratégies d'interruption et le profil des patients pouvant arrêter le traitement, nous pourrons réduire considérablement les coûts de santé et le risque d'interactions médicamenteuses ", poursuit-il. " Nous pourrions même éviter une perturbation inutile de l'écologie gastro-intestinale chez certains patients, mais ce dernier point doit être mieux documenté. Nous espérons obtenir avec notre protocole un taux de réussite nettement plus élevé que les 20% enregistrés dans le travail de fin d'études susmentionné. L'étude PEPPER comble une lacune. Il existe très peu de littérature dans le monde sur les stratégies d'arrêt de l'utilisation chronique d'un IPP. " Actuellement, 500 des 750 patients visés ont déjà été recrutés.