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A l'instar d'autres collègues-pharmaciens, le titulaire de Zoerle-Parwijs est cependant déçu de la (non) gestion de cette crise par les instances supérieures. " Avec le personnel soignant à domicile et les médecins, nous étions en première ligne. Ces écrans plexiglas nous ont permis de nous protéger, parce qu'il n'y avait rien. Il n'y avait pas non plus de règles pour les rapatriés, les prix demandés pour les masques buccaux étaient exorbitants et les supermarchés ont soudainement pu en vendre : nous avons vécu cela comme autant de coups durs. Les instances supérieures auraient pu montrer plus de reconnaissance pour tout ce que nous avons fait. Heureusement, nous avons la reconnaissance des patients. " Cet aspect de la prestation de service, d'aide aux personnes et de présence a toujours animé Clyde Tai-Apin. " Lors de mon choix d'études, je me suis rapidement tourné vers le domaine médical. La pharmacie a à voir avec le fait que je suis arrivé en Belgique en tant qu'étudiant boursier du Suriname. " Cette ancienne colonie néerlandaise d'Amérique du sud était autrefois un pays partenaire de l'AGCD, l'Administration générale de la Coopération au Développement. " Dans mon pays d'origine, vous pouvez étudier la médecine mais l'accès à l'université se fait par tirage au sort. Je n'ai pas été pris et j'ai donc cherché d'autres possibilités car je voulais absolument faire quelque chose dans le médical. Pour les étudiants surinamais qui veulent partir à l'étranger, il y a deux options : les Etats-Unis ou les Pays-Bas. Quelques-uns se retrouvent au Brésil ou à Cuba. L'AGCD proposait des bourses d'études pour les étudiants de pays partenaires, mais la sélection était stricte. J'ai été sélectionné et j'ai donc eu l'opportunité d'aller étudier la pharmacie en Belgique. " Clyde Tai-Apin ne regrette pas son choix d'études. " Si vous me posiez la question aujourd'hui, je choisirais probablement aussi la pharmacie. Ceci dit, j'aimerais encore comprendre comment des médecins spécialistes exécutent certaines interventions et traitent des pathologies, parce que je veux aider mes patients. Par essence, un pharmacien est une extension des connaissances des médecins, il est donc utile de savoir comment les choses fonctionnent pour fournir des conseils avisés aux patients et les rassurer. " Lorsque Clyde arrive à Anvers ('proche des Pays-Bas') en 1991, il doit s'adapter. " Je me souviens avoir ouvert de grands yeux devant une installation de chauffage, que nous ne connaissons pas sous les tropiques. Ma bourse s'élevait à 17.250 francs et je devais tout payer : les études, le loyer, la nourriture. C'est dans ces moments-là qu'on apprend à compter. Parfois, je me surprends encore à vérifier si j'ai assez d'argent sur moi, cela remonte à cette période. " Dans la ville des Sinjoren, il fait alors la connaissance d'une étudiante, Katleen De Wijn, sa partenaire actuelle. " Elle est de Heist-op-den-Berg. Nous avons lancé notre carrière en faisant des remplacements. Dans notre recherche de notre propre officine, nous sommes tombés sur cette pharmacie à Zoerle. Nous l'avons reprise en 2000. " L'étudiant boursier surinamais n'avait pourtant jamais eu l'idée d'échanger les tropiques contre les Pays-Bas. " Au Suriname, l'état est le plus grand importateur de médicaments. Il y a aussi des pharmacies privées mais sans connexions, l'approvisionnement est difficile. J'aurais dû partir de zéro. Tout est mieux organisé ici. Mais j'avais le mal du pays au début, quand j'étais étudiant. " L'appel des tropiques est toujours là, reconnait le pharmacien. " Dans un monde idéal, j'irai vivre quatre mois sous les tropiques et le reste de l'année ici. Je m'y rends chaque année à Noël. Je ne veux pas perdre ce lien, mes parents et ma famille vivent là-bas, la nouvelle année y est fêtée joyeusement. J'ai vraiment hâte d'y être. " Mais le voyage en fin d'année est incertain. " Le Suriname compte plusieurs cas de covid et on craint là-bas aussi une recrudescence ", explique-t-il. Ses expériences en tant qu'étudiant étranger résonnent dans ses mandats politiques. En tant qu'échevin et ancien président du CPAS, Clyde Tai-Apin a des contacts avec des demandeurs d'asile à Westerlo. " J'ai eu toutes les opportunités ici, dois-je alors fermer les portes aux nouveaux arrivants ? Ces personnes laissent tout derrière elles et risquent leur vie, cela ne se fait pas comme ça. Pour moi, cette crise montre qu'il faut donner une chance aux gens, mais il faut aussi saisir les opportunités. "