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Si ces deux frères originaires de Cyrrhus, dans le sud-ouest de la Turquie, sont aujourd'hui les saints patrons des médecins, des pharmaciens et des métiers apparentés*, c'est avant tout en raison des légendes qui les concernent dans la tradition chrétienne. Côme et Damien sont souvent représentés respectivement avec un flacon d'urines ou matula (en référence à la pratique consistant à examiner - mirer - les urines du patient pour poser un diagnostic) et un mortier et pilon - deux attributs qui symbolisent leur appartenance à une profession médicale, explique le président du Cercle d'Histoire. Côme et Damien sont vénérés surtout dans le sud de l'Europe, précise Romain Van Hautekerke en illustrant son propos par un ouvrage italien. " Regardez, les voilà représentés opérant un patient atteint de gangrène, dont ils vont remplacer la jambe amputée par celle d'un Maure. " Dans la liturgie orientale, les deux frères sont parfois désignés sous le nom de saints anargyres (" sans argent "), parce qu'ils offraient paraît-il leurs services sans se faire payer. Des représentations de ce type ne sont guère courantes dans nos contrées, mais le président a tout de même connaissance de quelques images de Côme et Damien à Louvain ; un inventaire de la collégiale Saint-Pierre révèle d'ailleurs qu'il existait jusqu'à la Révolution française une chapelle dédiée aux deux saints. " On trouve également une fresque qui les représente à l'église Saint-Martin (Martinikerk) de Groningue, peut-être en souvenir des spectaculaires marées de tempête qui ont frappé le nord de l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique à deux reprises à la fin du 15e et au début du 16e siècle, également connues sous le nom de raz-de-marée des saints Côme et Damien. " " Nous espérons que ces premiers indices donneront envie à nos membres de nous aider à identifier d'autres traces et références à nos saints patrons ", poursuit-il. " Nous sommes convaincus qu'il doit y en avoir (et pas seulement sous la forme de chapelles ou de représentations dans les églises de la région), même si nous avons aussi conscience que certaines choses ont sans doute déjà disparu. " Il a néanmoins bon espoir de voir cet inventaire couronné de succès, grâce notamment à la contribution d'une collaboratrice scientifique de l'hôpital Saint-Jean à Bruges qui est également membre du conseil d'administration du Cercle d'Histoire. " Nous avons aussi noué des contact avec le professeur Hans Geybels de la faculté de théologie de Louvain, dont les archives sur les croyances populaires de nos contrées pourraient receler une foule de données intéressantes concernant les processions, les pièces découvertes dans des églises, etc. " " Notre quête ne fait que commencer, l'appel n'ayant été lancé que récemment. Ce serait formidable si nous pouvions en présenter les résultats et conclusions le 26 septembre, fête des saints Côme et Damien ", rêve Romain Van Hautekerke. Cette étude iconographique fera certainement l'objet d'un numéro thématique spécial du bulletin du Cercle d'Histoire... et il ne fait aucun doute qu'elle viendra combler une lacune dans notre connaissance de nos saints patrons! Nous profitons de l'occasion pour nous arrêter un instant avec Romain Van Hautekerke, lui-même pharmacien, sur le travail du Cercle Benelux d'Histoire de la Pharmacie. " Notre organisation a été fondée en 1950, dans le contexte de l'idéal européen qui s'est développé après la 2e Guerre Mondiale. N'oublions pas que le Benelux a été le premier accord de collaboration transnational, bien avant qu'il ne soit question de la CECA ou de l'Europe des Six. Notre Cercle d'Histoire s'est organisé à l'échelon du Benelux, bien que ses ailes néerlandophone et francophone aient, au fil des années, commencé à déployer leurs activités chacune de son côté. " Le Cercle a rassemblé ces dernières décennies une impressionnante collection touchant au patrimoine pharmaceutique et médical de nos contrées, poursuit son président. Conservée à Urk, sur les rives de l'IJsselmeer en Hollande-Septentrionale, elle n'est malheureusement accessible qu'aux chercheurs. " Le choix du site a été motivé surtout par des considérations pratiques: à Urk, nous avons la place de stocker toute notre collection. Même si elle est précieuse, le but premier est de la conserver. " Où, alors, trouver un bel aperçu historique de la profession pharmaceutique accessible au plus grand nombre? Romain Van Hautekerke n'a pas besoin de réfléchir pour citer une série de musées. " L'hôpital Saint-Jean de Bruges, par exemple, a une très belle collection. À l'autre bout du pays, le Musée de la Pharmacie installé sur la Grand-Place de Maaseik vaut également le détour, tout comme l'Hôpital à la Rose à Lessines. Il y a aussi la collection de la société des pharmaciens d'Anvers (KAVA), ainsi que d'innombrables collections privées de pharmacopées, de mortiers, de majoliques, de panneaux publicitaires, etc. constituées par des collègues. " Notre interlocuteur est lui-même un collectionneur passionné qui s'intéresse à de nombreux domaines, dont l'histoire locale. " Lorsque j'ai repris mon officine sur la Grand-Place de Tamise, dans les années 1970, j'ai immédiatement commencé à m'investir dans le musée communal. Nous y organisons régulièrement des expositions, notamment sur l'impact de l'ancien chantier naval du Boelwerf, mais aussi par exemple sur des métiers locaux comme le travail de l'osier ou du jute. Et saviez-vous qu'un four de potier gallo-romain a été mis au jour sur la Grand-Place? " Même si son fils a aujourd'hui repris le flambeau, Romain Van Hautekerke reste actif à temps partiel à l'officine. " Ces contacts sociaux restent un aspect important de notre métier et j'aime continuer à m'impliquer de cette manière... mais l'après-midi, j'ai désormais le temps de me consacrer à d'autres passions, comme le Cercle d'Histoire. "