Une campagne de dépistage gratuit du diabète vient d'être lancée dans 27 pharmacies du Hainaut. Ce type d'action permet à tous d'accéder facilement à une analyse de risques et, au besoin, à un suivi médical adapté. Il s'agit aussi de sensibiliser le grand public à cette maladie chronique.
...
Taking Care en province du Limbourg en 2015, Chronilux en province de Luxembourg en 2019-20-21, Care Test à Bruxelles en 2021, PACT en province du Hainaut en 2021-22... "Depuis plusieurs années des projets pilotes de dépistage du diabète sont menés en officine. En Belgique, 1/3 des personnes ignorent qu'elles sont diabétiques. L'objectif est de les amener plus rapidement dans un trajet de soins. Ce projet est critiqué par le corps médical qui dit que notre rôle n'est pas de diagnostiquer, mais tel n'est pas notre objectif. On ne veut pas remplacer le médecin, on veut dépister et orienter les personnes vers une prise en charge et ce, avant l'apparition de la maladie ou des complications", nous précisait Koen Straetmans, président de l'APB, fin 2021. Depuis, si on attend toujours l'officialisation du projet de sevrage des benzos, les projets pilotes de dépistage du diabète continuent à prendre place en pharmacie à l'instar de celui qui vient de recommencer dans le Hainaut, dans le cadre du PACT (Plan d'Accompagnement Concerté Transversal), l'un des 12 projets de soins intégrés initiés par l'Inami en 2017. Cette campagne, comme les précédentes, s'appuient sur l'expérience Taking Care, menée en province du Limbourg en 2015, la première à avoir montré d'excellents résultats sur le dépistage du diabète et des états prédiabétiques. Du 20 avril au 15 juin, toute personne âgée de 18 ans et plus habitant dans une des 6 entités de la Communauté urbaine du Centre (Braine-le-Comte, Ecaussinnes, Le Roeulx, Manage, Seneffe, et Soignies), exception faite des patients déjà diagnostiqués et des femmes enceintes, peut passer ce test, à sa demande ou sur proposition du pharmacien. Elle répond d'abord à un questionnaire (Findrisc, Finnish Diabetes Risk Score) qui permet de déterminer un profil de risque et, en fonction du résultat, elle est invitée ou non à faire un autotest d'hémoglobine glyquée (HbA1c) qui reflète la glycémie sur 3 mois. Il s'agit du système de dépistage le plus fiable, privilégié par les diabétologues. Selon la valeur obtenue, le pharmacien la renvoie ou non vers le médecin généraliste. Il dispense également des messages de prévention et de promotion de la santé autour de l'activité physique et d'une alimentation saine. La rémunération du pharmacien s'élève à 25? par test réalisé. Ce dépistage qui se fait de préférence dans l'espace de confidentialité dure 15 à 20 minutes. 27 des 40 pharmacies dans la zone concernée participent. En mai-juin, il s'agit de 6 communes autour de Soignies et en novembre-décembre, ce sera au tour de 6 autres communes autour de La Louvière. Les officines sont géolocalisées sur le site du PACT et un sticker sur la vitrine permet de les repérer. "Quand j'ai entendu parler de cette initiative, je m'y suis intéressée et, pendant notre formation, on a vu les résultats des campagnes précédentes, qui m'ont paru assez concluants pour m'y investir. Ce genre d'initiative permet d'atteindre une population plus précarisée, de favoriser la prise en charge dans la première ligne de soins et de renforcer le lien avec le médecin généraliste. Lors du dépistage, le pharmacien peut jouer son rôle dans la prévention et l'éducation à la santé", explique Céline Pools, pharmacienne à Casteau et coach pour cette campagne de dépistage du diabète. C'est elle qui guide les pharmaciens et répond à leurs questions: "Je les aide à mettre le pied à l'étrier, l'accompagnement du changement c'est super important". Les pharmaciens intéressés ont reçu une première formation en distanciel, expliquant toute la procédure, et une seconde en présentiel sur les aspects pratiques. "On vise 1 dépistage/jour, c'est le minimum pour que cette campagne ait un sens sur la période prévue. En général, c'est plutôt bien accueilli par les patients", constate Céline Pools. "L'intérêt de ce dépistage en pharmacie c'est qu'il n'est pas contraignant: il ne faut pas être à jeun, ni prendre rendez-vous, c'est gratuit... On peut donc toucher plus facilement les personnes les plus éloignées des soins", précise Anne-Françoise Raedemaeker, coordinatrice du PACT. L'année passée, lors du premier projet qui concernait Binche, La Louvière et Morlanwez, 904 personnes ont été dépistées en 2 campagnes successives et 24% ont été référées au médecin généraliste. Un résultat un peu plus élevé qu'à Bruxelles où le projet Care Test, lancé pendant la crise Covid, a permis de renvoyer 1 personne testée sur 5 vers le généraliste. "Le but est de définir dans quelles conditions un patient pourrait bénéficier d'un prédépistage du diabète en officine. Nous testons des actions, nous démontrons leur pertinence sur la promotion de la santé puisque que 100% des patients ont été sensibilisés et ont reçu de l'info sur le diabète et son lien avec des comportements de santé et qu'un quart a été orienté vers le généraliste. On a vraiment un rôle d'activation du patient et de mise en cohérence de la première ligne", insiste-t-elle. Si un patient en situation de prédiabète perd 10% de masse corporelle et fait un peu d'activité physique, il réduit de moitié son risque de développer un diabète dans les 10 ans. On imagine l'impact potentiel sur la qualité de vie et... les finances publiques. Les économies ainsi générées permettraient de financer ce service, estiment ceux qui défendent cette nouvelle mission du pharmacien. L'objectif étant de travailler dans un contexte multidisciplinaire où le patient est intégré dans un trajet de soins. Encore faut-il que la population soit sensibilisée à cette affection... C'est l'un des buts poursuivis par ces projets pilotes de dépistage du diabète, qui sont aussi un bel exemple de concertation médicopharmaceutique et du profilage de la pharmacie comme futur centre d'orientation des patients.