Pour sensibiliser les pharmaciens et les médecins généralistes wallons à la problématique du suicide par médicaments, le Centre de référence de prévention du suicide a établi des recommandations de bonnes pratiques.
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Toutes les 40 secondes, une personne meurt par suicide dans le monde... La Belgique n'est bien sûr pas épargnée et occupe même la 4e place des pays où le taux de suicide est le plus élevé (OCDE, 2016-18). "La prise de médicaments est le 2e moyen le plus utilisé par les femmes pour se suicider après la pendaison et le 3e chez les hommes après la pendaison et les armes à feu. Selon les données les plus récentes, 14% des personnes sont décédées par intoxication médicamenteuse volontaire en 2015 (Observatoire wallon de la santé cellule NADE, 2015)", indique Un pass dans l'impasse, le Centre de référence de prévention du suicide (CRePS). L'une des méthodes les plus efficaces pour réduire le nombre de décès par suicide est de limiter l'accès aux moyens létaux, estime l'Organisation mondiale de la santé qui conseille notamment de sensibiliser les professionnels de la santé concernant la prescription, la vente et l'usage excessif de médicaments par les publics à risque. Afin d'élaborer des recommandations de bonnes pratiques pour soutenir les pharmaciens et les médecins généralistes dans leur travail, il convenait d'abord de déterminer comment ils appréhendaient le suicide par médicaments. Le CRePS a réalisé, en avril dernier, une enquête en ligne auprès de ces deux groupes: 120 pharmaciens et 21 MG y ont répondu (le faible nombre de réponses de ces derniers est une des limites de ce travail). Résultats? En moyenne, les pharmaciens qui ont répondu à l'enquête estiment que la population ne dispose pas d'une connaissance réelle concernant une consommation inadéquate/excessive des médicaments ni de leur létalité. Ils ne pensent pas que les professions de la santé sont davantage des métiers à risque de suicide par médicaments, ni qu'il existe une relation entre surconsommation ou automédication et taux de suicide par médicaments. 95% disent ne pas disposer d'assez d'informations sur les structures d'accueil et de prise en charge des personnes ayant fait une tentative de suicide (TS) ou présentant des caractéristiques suicidaires. Pour plus de la moitié des répondants, les futurs professionnels de la santé doivent être sensibilisés au suicide par intoxication médicamenteuse lors de leur formation. 63% estiment que la pharmacie est un lieu propice de prévention du suicide (notamment par médicaments) et un même pourcentage souhaiterait bénéficier d'une formation à l'écoute des patients dépressifs et être davantage informés des outils préventifs. Côté généralistes, plus de moitié trouve aussi que les futurs professionnels de la santé doivent être sensibilisés à cette thématique et 62% estiment que le MG doit avoir un rôle dans la prévention du suicide. Enfin, 52% souhaiteraient suivre d'une formation à l'écoute des patients dépressifs. En moyenne, les répondants affirment être confrontés une fois par an à un suicide (avéré) par intoxication médicamenteuse volontaire, mais ils estiment que le caractère 'tabou' de cet acte est un biais important. Ainsi, le nombre de décès par suicide serait sous-estimé dans les statistiques officielles (absence de critères précis et manque d'autopsies), apprend encore le CRePS. Enfin, les réponses à l'enquête ont mis en évidence le caractère peu satisfaisant de la communication entre médecins et pharmaciens, alors qu'elle permettrait parfois d'éviter des problèmes de surconsommation. Quant aux médicaments les plus fréquemment utilisés, les pharmaciens citent les benzodiazépines, paracétamol, antidépresseurs, anxiolytiques, insuline et somnifères ; et les MG, les benzodiazépines, antidépresseurs, paracétamol et somnifères. Ces résultats et une revue de la littérature ont permis au CRePS d'élaborer des recommandations à destination des pharmaciens. Les quatre principales (voir ci-contre) incitent à être attentif à leur rôle de 'premier confident', à la communication médecin/pharmacien, à la surconsommation de médicaments et à inciter les patients à ramener ceux dont ils n'ont plus besoin ou les périmés. De plus, elles invitent à prendre le temps d'informer les patients sur les aspects dangereux du médicament. "Il existe une relation non négligeable entre la perception de la létalité et la récidive de conduite suicidaire ; dans la majorité des cas, le lien entre l'intentionnalité suicidaire et la faible létalité médicale peut être expliqué par le choix impulsif du patient et par la méconnaissance de la dangerosité réelle du produit", commente le CRePS qui conseille en outre d'oeuvrer à la déstigmatisation du suicide. Les recommandations internationales invitent ainsi à se former à identifier la dépression et d'autres troubles mentaux ou liés à l'usage de substances psychoactives, à identifier la présence d'idéations suicidaires, à évaluer le niveau de risque et être à même de réagir en conséquence (éloigner le moyen létal...). Pour l'OMS, il convient d'être attentif aux groupes à risque (endeuillés par suicide, victimes d'abus et de discrimination, personnes âgées isolées, adolescents en rupture, réfugiés, détenus...).