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La multiplication du nombre d'options médicamenteuses pour la prévention de la migraine est une perspective importante. Bon nombre des médicaments disponibles aujourd'hui n'ont qu'une efficacité modérée et s'accompagnent parfois d'effets indésirables, contre-indications et/ou interactions médicamenteuses qui en limitent l'utilisation. C'est ce qui explique pourquoi les patients migraineux sont si peu nombreux - à peine 3% à 13% selon les estimations de l' American Headache Society (AHS) - à prendre un traitement préventif, alors que celui-ci soulagerait environ 40% des patients souffrant de migraine épisodique et pratiquement tous les patients migraineux chroniques. Aucun des médicaments actuellement utilisés en prévention de la migraine n'a été spécialement développé pour cette indication.Pourtant, les médicaments plus anciens demeurent les options de première ligne en prévention de la migraine. Selon l'AHS, les traitements préventifs dotés d'une activité prouvée sont les antiépileptiques (acide valproïque/valproate, topiramate) et les bêta-bloquants (métoprolol, propranolol, timolol). Compte tenu de leur potentiel tératogène, l'acide valproïque/le valproate et le topiramate ne peuvent pas être utilisés chez la femme enceinte ou chez la femme en âge de procréer. De manière plus générale, l'AHS recommande d'éviter autant que possible les traitements préventifs contre la migraine dans cette catégorie de patientes. Le document de consensus énumère par ailleurs une série de médicaments qui sont possiblement efficaces et qui peuvent dès lors être envisagés : les antidépresseurs amitriptyline et venlafaxine, les bêtabloquants aténolol et nadolol, ainsi que le candésartan.L'instauration d'un traitement préventif contre la migraine est indiqué si :Les crises migraineuses perturbent les activités quotidiennes du patient en dépit de l'utilisation d'un traitement aigu contre la migraine :Le patient connaît plus de quatre épisodes de céphalées par mois :Le traitement aigu est contre-indiqué pour l'une ou l'autre raison ;Le traitement aigu est utilisé de manière excessive : plus de 10 jours par mois sous dérivés de l'ergot, triptans, opioïdes ou associations fixes. Il est également question d'usage excessif lorsque le patient prend différents médicaments contre les maux de tête pendant plus de 10 jours par mois, même s'il n'utilise aucun d'eux de manière fréquente.Tout traitement préventif ue la migraine doit être instauré à faible dose. La dose est ensuite augmentée jusqu'à l'obtention de l'effet souhaité, jusqu'à la dose cible/maximale ou jusqu'à l'apparition de problèmes de tolérance. Il est possible d'associer différentes molécules dans le cas où une réponse partielle, mais insuffisante, est obtenue ou si la posologie ne peut plus être augmentée en raison d'effets indésirables. Pour chaque dose cible, il est important d'attendre au moins 8 semaines pour évaluer l'effet obtenu. En l'absence d'effet après ce délai, une autre molécule devra être instaurée. Face à une réponse partielle, il faut tenir compte du fait que le résultat peut encore s'améliorer sur une période de six à douze mois.Il est important que le patient ait des attentes réalistes quant à l'effet d'un traitement préventif. Certains pensent que les crises disparaîtront rapidement après le début du traitement préventif, alors qu'il y a généralement un temps de latence. Le patient doit être informé qu'un traitement préventif peut être considéré efficace siLe nombre de jours où il souffre de maux de tête est réduit de moitié ;La durée ou la sévérité des crises diminue significativement (une notion laissée au jugement du patient) ;La réponse au traitement aigu s'améliore ;Les crises migraineuses perturbent moins la vie quotidienne du patient ;La qualité de vie s'améliore.Les probabilités de réussite du traitement préventif peuvent être optimisées par une bonne préparation du patient en matière d'attente. Une information claire sur les effets indésirables éventuels s'inscrit aussi dans ce cadre.Une nouvelle classe de médicaments préventifs contre la migraine inhibe le peptide apparenté au gène de la calcitonine (calcitonine gene-related peptide ou CGRP). Présent dans les neurones centraux et périphériques, ce peptide se retrouve en concentrations plus élevées chez les patients migraineux. Les inhibiteurs du CGRP sont un groupe d'anticorps monoclonaux qui bloquent soit le récepteur du CGRP (érénumab), soit le peptide même (frémanézumab, galcanézumab, éptinézumab). Il s'agit des premiers agents spécifiquement développés pour le traitement de la migraine depuis le méthysergide, commercialisé en 1962 et aujourd'hui tombé en désuétude. Ils ont démontré, dans des études randomisées contre placebo, leur efficacité, leur sécurité et leur bon profil de tolérance en prévention de la migraine épisodique et chronique. En fonction de la molécule, ils peuvent être administrés toutes les 4 à 12 semaines, par voie sous-cutanée ou intraveineuse.Aucune titration n'est nécessaire. Les inhibiteurs du CGRP peuvent produire un effet rapide, en quelques jours ou semaines. Ils peuvent être utilisés chez les patients n'ayant pas obtenu l'effet escompté aux précédentes tentatives de traitement préventif, mais peuvent aussi être co-administrés avec des traitements préventifs par voie orale. Ils sont méta-bolisés par le système réticulo-endothélial. Ils ne nécessitent donc ni métabolisme hépatique ni excrétion rénale, ce qui minimise le risque d'interactions avec d'autres médicaments. Au vu du coût plus élevé de ces médicaments par rapport aux solutions des anciennes générations, leur usage sera limité aux patients qui n'atteignent pas de résultat satisfaisant avec d'autres traitements préventifs.L'efficacité d'un inhibiteur du CGRP s'évalue sur un délai de trois à six mois. La réponse à la deuxième dose peut être meilleure que celle observée après la première. Et une légère amélioration peut encore être constatée après la troisième dose. L'enregistrement d'un premier inhibiteur du CGRP est en cours d'évaluation par les autorités belges.