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Chaque année, plus de 20.000 Belges sont victimes d'un AVC. D'après les études internationales, l'immense majorité des patients décèdent ou doivent être institutionnalisés dans les cinq ans qui suivent, ce qui fait de l'AVC la seconde cause de mortalité (après les cardiopathies ischémiques) et la troisième cause d'invalidité à l'échelon mondial. Au-delà de la perte économique, la prise en charge, le traitement, la réadaptation et les soins de longue durée apportés à ces patients représentent dans notre pays un coût annuel de 1,5 milliard d'euros. S'agissant des AVC aigus qui représentent environ 80% de l'ensemble des cas, les possibilités thérapeutiques se sont fortement élargies au cours des 20 dernières années, avec l'avènement de médicaments capables de dissoudre les caillots et de nouvelles techniques pour les éliminer de façon mécanique. Les deux approches boostent les chances d'un bon rétablissement mais sont fortement dépendantes du timing de l'intervention: quelques heures après l'apparition des symptômes, elles n'ont plus chez une grande partie des patients qu'un effet négligeable. Dans ce contexte où chaque minute compte, les pharmaciens représentent - avec les médecins de famille et les autres soignants de première ligne - un maillon très important de l'éducation des patients à la reconnaissance des symptômes de l'AVC. Après un premier AVC, un patient sur six fera une rechute dans les cinq ans. Les mesures de prévention secondaire visent à réduire les facteurs de risque cardiovasculaire, à stimuler la prise d'antithrombotiques et de statines en cas d'AVC et à inciter l'intéressé à adopter un mode de vie (plus) sain. Ces mesures ont permis d'abaisser le risque de rechute de 80% dans les grandes études cliniques, mais sans jusqu'ici déboucher sur une amélioration spectaculaire dans la pratique clinique, vraisemblablement en raison d'une implémentation trop frileuse par les médecins et d'une compliance lacunaire. Les pharmaciens ont un rôle crucial à jouer pour motiver les patients post-AVC et pour leur apporter des informations quant au bon usage de leurs médicaments. Les mesures susceptibles de simplifier le schéma médicamenteux - par exemple par le biais d'une "polypill" - sont une manière efficace d'améliorer la compliance. Par ailleurs, des systèmes qui améliorent la communication transmurale entre pharmaciens, généralistes et spécialistes peuvent contribuer à garantir un contrôle adéquat et durable des facteurs de risque cardiovasculaire. En dépit des avancées engrangées au niveau du traitement et de la prévention secondaire, le nombre d'AVC enregistrés à travers le monde a augmenté de 70% en chiffres absolu au cours des 30 dernières années sous l'effet du vieillissement de la population et de l'augmentation du nombre de cas dans les pays en développement. On s'attend en outre à ce que son incidence - et l'invalidité qui l'accompagne - continue à progresser dans les années à venir. Une diminution durable de l'invalidité et des coûts associés à l'AVC ne pourra être obtenue qu'en investissant le plus possible dans la prévention primaire. Des exemples internationaux démontrent que les pharmaciens peuvent endosser un rôle actif dans la prévention de l'AVC: au Royaume-Uni, par exemple, un dépistage systématique des facteurs de risque chez les patients souffrant de fibrillation atriale a débouché sur une initiation plus judicieuse des traitements anticoagulants et sur une réduction de 10% du nombre d'AVC. Chez nous aussi, des initiatives de ce type reposant sur les connaissances et les atouts des pharmaciens pourraient contribuer à abaisser la charge associée à cette problématique. Sachant que 90% des AVC sont dus à des facteurs de risque modifiables, informer notre large population de patients concernant l'importance de la cessation tabagique, de l'activité physique, d'une alimentation saine, de l'abaissement de la tension et du taux de cholestérol et d'une bonne maîtrise de la glycémie relève d'une responsabilité partagée. La présence de matériel éducatif, la promotion de mesures comme p.ex. la prise de la tension à domicile et l'évaluation de la complétude du schéma médicamenteux ne sont que quelques pistes susceptibles d'ouvrir le dialogue avec le patient dans l'espoir de lui assurer un avenir sans AVC.