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En septembre dernier, une équipe de l'université de Hong-Kong a publié une étude1 démontrant une altération importante du microbiote fécal des patients hospitalisés pour Covid. Lors de la comparaison des selles entre des patients Covid-19 et des patients sains, on a démontré: ? une corrélation avec des niveaux de cytokines pro-inflammatoires aggravant la maladie et un enrichissement des selles par des bactéries pathogènes opportunistes genre Klebsiella, Streptococcus et Ruminococcus gnavus. ? un épuisement de la flore commensale bénéfique à l'immunité intestinale genre Bacteroidetes capable d'abaisser l'expression des récepteurs de conversion de surface des enzymes 2 de l'angiotensine I (ACE2-peptidase) dans le côlon. Si la porte d'entrée du SARS-CoV-2 est bien le récepteur de l'ACE2 peptidase dans les pneumocytes, il est à noter que ce récepteur est exprimé dans d'autres organes, dont le coeur, le rein, les cellules endothéliales et aussi l'intestin. Pour rappel, le rôle principal de l'ACE2-peptidase est la dégradation de l'angiotensine II dans le système rénine-angiotensine (RAS). Le RAS règle le flux sanguin, la pression sanguine, la natriurèse et il contrôle le volume sanguin. Le dérèglement de ce système entraîne la cascade des complications cardio-vasculaires décrites dans l'infection au SARS-CoV-2. Il existe un lien clair entre une dysbiose intestinale couplée à une inflammation épithéliale pro-inflammatoire et la gravité de la maladie. Enfin, le risque d'une infection bactérienne secondaire n'est pas négligeable chez les patients hospitalisés avec des comorbidités annexes (patients âgés, diabétiques, hypertendus, surcharge pondérale...) qui présentent à la base une flore commensale pauvre en bactéries bénéfiques genre Bacteroitedes.Fait encore plus signifiant, cette dysbiose intestinale persiste même après l'élimination du SARS-CoV-2 (évaluée par PCR) et après la résolution de la symptomatologie pulmonaire et cardio-vasculaire. Un microbiote sain permet de réduire la gravité de la maladie et des complications post-covid. On peut soit renforcer la flore intestinale avec les prébiotiques, soit protéger l'endothélium. Les prébiotiques sélectifs représentent une bonne alternative car ils fournissent des substrats métabolisables permettant la croissance des bonnes bactéries capables de modifier le microbiote. Ces propriétés amènent à une nouvelle définition du prébiotique: tout composant alimentaire non viable capable d'améliorer la santé de l'intestin de l'hôte par des modifications du microbiote. C'est le cas de la berbérine et de la curcumine. La berbérine est un alcaloïde de l'isoquinoléine que l'on trouve dans les racines et les rhizomes: ? des Berbéridacées (Berberis vulgaris ou épine-vinette, Berberis aristata), ? des renonculacées comme l'Hydrastis canadensis. Les propriétés reconnues de la berbérine dans les affections cardiovasculaires sont: ? une réduction de la glycémie, ? une action complète sur le bilan lipidique grâce à son action sur l'ampK, ? une action sur la stéatose hépatique non alcoolique (NASH) De façon étonnante, on a aussi démontré que la berbérine était capable de modifier le microbiote en augmentant l'abondance des bactéries bénéfiques productrices d'acides gras à chaînes courtes comme le butyrate (Wanga 2017)2. Le butyrate sert de " carburant " énergétique aux cellules intestinales ce qui explique pourquoi on s'intéresse à la berbérine pour réguler le métabolisme énergétique des entérocytes de l'intestin et l'intégrité de la barrière intestinale. Il n'existe pas de recommandation officielle quant au dosage recommandé. La plupart des études se basent sur une dose de 900 mg/j afin de limiter les effets secondaires associés (troubles gastro-intestinaux, hypoglycémie, hypotension). La prudence est de mise avec les patients diabétiques, sous anticoagulants et les hypotendus. Elle est contre-indiquée pendant la grossesse. La curcumine, principe actif du Curcuma longa, est capable de modifier la composition du microbiote intestinal. On a en effet relevé chez tous les participants de l'étude " Peterson "3 ayant reçu des compléments de Curcuma longa des variations significatives dans le temps de la biodiversité de leur flore intestinale, chacun avec une réponse individualisée. En outre, une étude menée par la Pr Nathalie Delzenne 4 et son équipe de l'UCLouvain a démontré que l'association de berbérine et de curcumine permettait d'augmenter considérablement les niveaux d'Akkermansia muciniphila et des espèces de Bifidobactéries souches bénéfiques pour la flore commensale. Le SARS-CoV-2 affecte directement les cellules endothéliales, ce qui explique les manifestations systémiques observées chez les patients atteints de Covid-19, y compris les complications thrombotiques. D'où la nécessité de protéger l'endothélium et de réduire le syndrome métabolique qui l'endommage gravement. Par ses puissantes propriétés antioxydantes, l'hydroxytyrosol contenu dans l'olive est capable d'améliorer la fonction endothéliale. En outre, l'extrait d'olive standardisé en oleuropéine et en hydroxytyrosol est capable de modifier tous les paramètres du syndrome métabolique en améliorant les tensions systolique et diastolique, en diminuant les triglycérides, le tour de taille, le glucose à jeun et en augmentant le taux d'HDL-cholestérol. (Hermans et Pincemail 2020)5.