En 30 ans, nous avons perdu une heure de sommeil. De nombreux adultes ne dorment en effet pas sept à neuf heures par nuit comme recommandé, et le sommeil irrégulier est très fréquent. Autant d'éléments aux conséquences délétères sur la santé physique et mentale.
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Le sommeil, c'est la moitié de la santé", dit le proverbe qui semble de plus en plus énoncer une vérité. Pas un jour en effet sans qu'une nouvelle étude ne vienne documenter ses multiples bienfaits. Qu'il s'agisse de son influence sur la santé cardiovasculaire, sur le risque de diabète, d'obésité et de cancer, sur le vieillissement, l'ostéoporose, ou encore sur la santé mentale et cognitive. Le sommeil fait désormais partie des facteurs de mode vie sain, au même titre que l'alimentation ou l'activité physique. Malheureusement, à l'instar de ces dernières, il est de plus en plus malmené: sa qualité et sa durée laissent souvent à désirer. C'est ce que vient encore de confirmer une étude australienne[1] qui s'est attachée à mesurer la durée moyenne et la variabilité du sommeil, de façon la plus objective possible (à l'aide d'un capteur placé sous le matelas), sur une longue période (neuf mois) et sur près de 68.000 personnes dans le monde (78% d'hommes, 22% de femmes, âge moyen de 50 ans). Environ 30% des adultes dormaient moins ou plus que la durée préconisée de sept à neuf heures par nuit. Et même chez ceux qui respectaient ces recommandations, environ 40% des nuits se situaient en dehors de cette fourchette. Seuls 15% des participants ont dormi ce laps de temps idéal pendant au moins cinq nuits par semaine. Par ailleurs, la durée du sommeil était supérieure de 30 minutes le week-end par rapport aux jours de la semaine. Qu'en est-il de l'âge et du sexe? Ils étaient significativement associés à la durée moyenne du sommeil, les adultes d'âge moyen dormant moins longtemps que les plus jeunes et les plus âgés, les hommes dormant légèrement moins que les femmes. Quant à la variabilité de la durée du sommeil, elle diminue avec l'âge, mais elle ne diffère pas selon le sexe. Dans les études épidémiologiques, dormir moins de six heures en moyenne par nuit est associé à un risque accru de mortalité toutes causes confondues et à de multiples problèmes de santé, notamment l'hypertension, l'obésité et les maladies cardiovasculaires. De même, dormir plus de neuf heures en moyenne est également associé à un risque accru de mortalité toutes causes confondues et à un éventail similaire de troubles tels que l'hypertension, les AVC et le diabète. Des études expérimentales ont montré que dormir moins de sept heures affecte négativement le métabolisme du glucose et la sécrétion de cortisol, et entraîne des déficits neurocomportementaux. Le sommeil irrégulier lui-même apparaît comme un facteur de risque, notamment d'hypertension. Avec les apnées et la durée, c'est l'une des trois variables du sommeil les plus associées à la mortalité. Le décalage horaire social (à savoir entre l'heure biologique et l'heure sociale) est considéré comme un modèle spécifique de sommeil irrégulier, les personnes dormant plus tard les jours libres et luttant ensuite pour se réadapter à l'horaire de sommeil les jours de travail. Ce modèle a été associé à des risques accrus de diabète de type 2 et d'obésité. De plus, tous ces effets négatifs s'accumu- lent au fil des nuits successives de restriction partielle du sommeil. L'ensemble de ces études suggère une relation en U entre la durée du sommeil et les effets sur la santé, selon laquelle la durée optimale pour éviter les déficits fonctionnels et les problèmes de santé à long terme se situe entre sept et neuf heures pour les adultes. Par conséquent, il est préoccupant de constater qu'une proportion importante de personnes ne dort pas le temps préconisé. D'autant que les conséquences délétères d'un manque de sommeil sur les facultés physiques et mentales et sur la santé sont encore largement négligées dans le monde. Or, il s'agit d'un enjeu de santé publique et sociétal de plus en plus aigu à l'ère de l'hyperconnexion.