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Fin 2017, 12 projets de soins intégrés pour les malades chroniques ont été sélectionnés par la ministre de la Santé publique. Ils ont été lancés en janvier 2018, les moyens budgétaires étant prévus pour une durée de 4 ans. L'objectif est de rationaliser les soins aux personnes souffrant d'une affection chronique (2,5 millions de Belges), en améliorant la collaboration entre les acteurs concernés depuis les dispensateurs de première et deuxième lignes, en passant par les centres d'hébergement, les soins à domicile, les associations de patients, mais aussi les mutualités, le secteur des loisirs, les autorités locales..., sans oublier les patients. Chaque projet développe un plan d'action et bénéficie de l'appui scientifique, technique et méthodologique d'une plateforme d'accompagnement.Début 2018, nous avons présenté le projet Rélian centré sur l'autonomie globale des patients à Liège et Seraing et, en février dernier, une initiative prise dans le cadre du projet Chronilux (province de Luxembourg) qui visait à dépister le diabète en officine. Aujourd'hui, nous nous attardons sur l'avancée du projet PACT dans la région du Hainaut-Centre.Le PACT ou " Plan d'Accompagnement Concerté Transversal " concerne plus précisément La Louvière, Binche et Morlanwelz et s'adresse aux patients qui souffrent de limitations physiques liées à une pathologie chronique, le but étant de ralentir ou prévenir les situations complexes. Trente partenaires y collaborent dont le CHU Tivoli et l'UPHOC (Union pharmaceutique du Hainaut occidental et central).A l'origine, ce projet ne concernait que les maladies chroniques neurologiques qui ont un impact négatif sur la mobilité : " Parce que moins le patient est mobile, plus il s'enferme sur lui-même et plus il rentre dans une spirale négative, explique Charles Ronlez, directeur de l'Uphoc. Aujourd'hui, toutes les maladies chroniques susceptibles de limiter la mobilité sont prises en compte. Le PACT consiste notamment à faire l'inventaire de tout ce qui favorise cette mobilité : aides, prévention (sport, piscine...), contacts sociaux, bien-être... "." Concrètement, on incite les patients qui ont le profil et rentrent dans le projet à avoir un pharmacien de référence qui suit leur traitement et s'engage à faire deux fois par an une revue de leur médication. De plus, le pharmacien peut inclure des patients dans le projet en les mettant en rapport avec le RLM (Réseau Local Multidisciplinaire) ou le médecin traitant. On avertit le médecin qu'on inclut le patient dans le projet, le suivi est fait par la structure du PACT ".Pour soutenir les pharmaciens participants, une formation aux outils informatiques de gestion des schémas des médicaments (Stopp/Start...), à la relation avec le patient et avec le médecin traitant est prévue (2 soirées).Si le budget doit encore être validé par le comité de l'assurance à l'INAMI (ce qui devrait être fait en août ou septembre), les premiers pharmaciens tests viennent d'être formés et commencent à inclure des patients. " Nous aimerions que tous les pharmaciens des communes concernées participent au projet, mais nous savons que ce ne sera pas le cas, ajoute Charles Ronlez. Nous avons des contacts avec l'Ophaco qui veut aussi impliquer les pharmacies coopératives. Sur la soixantaine d'officines concernées, une quarantaine devrait être réellement active. Ceux qui participent sont les plus motivés par le fait d'offrir plus de services aux patients ".Le projet PACT sera véritablement lancé auprès des pharmaciens le 12 septembre prochain après avoir eu l'accord financier de l'INAMI. " Nous avons perdu beaucoup de temps dans les formalités administratives. C'est pour ça qu'on ne commence réellement que maintenant avec un budget ".La rémunération prévue pour réaliser un schéma de médication 2 fois/an est de 90?/patient. " Pour la première année, nous tablons sur 270 patients inclus. Sur une population de plus de 100.000 patients potentiels, ces 270 sont encore loin de l'objectif d'inclusion du projet Chronic Care "." Notre objectif est aussi d'augmenter le taux de pénétration pour pouvoir calculer les gains d'efficience et voir l'impact de l'action sur la santé de la population en général et sur le coût des soins de santé pour que l'économie réalisée (hospitalisations, médicaments...) soit réutilisée dans d'autres projets qui, pour l'instant, ne sont pas ou moins bien supportés. C'est le but du projet, insiste-t-il : arriver, dans un bassin de soins, à mieux répartir les moyens dévolus à chacune des professions ".Le directeur de l'Uphoc est-il confiant dans la réussite et la pérennité du projet ? " Je suis un peu mitigé parce que c'est assez complexe à mettre en place. Au début, on ne nous a pas beaucoup écoutés à l'INAMI : on nous disait qu'on aurait des budgets quand on aurait prouvé qu'il y avait un gain d'efficience. C'est pour ça qu'on a pris du retard : il a fallu convaincre les autorités qu'elles devaient investir ".Autre frein, la multidisciplinarité : " Tout le monde est-il d'accord pour céder une partie de ses revenus au profit d'une collectivité, d'une autre redistribution ? Ici aussi, il fallait des garanties. Pour nous, pharmaciens, c'est un peu l'effet de la révision de médication : si le patient comprend mieux son traitement, souvent il prend moins de médicaments, donc, heureusement que l'action est rémunérée. Les pharmaciens sont conscients qu'il faut aller vers cela, mais d'autres professions comme les médecins ne le sont pas. C'est le noeud du problème : c'est une très belle idée coopérative, mais il faut que tous les acteurs soient convaincus. On n'a pas vu beaucoup de médecins aux réunions et peu incluent des patients parce qu'ils ont l'impression qu'ils perdent une partie de leur liberté, de leurs prérogatives. C'est pourquoi il faut au minimum tester et voir si cela fonctionne... ", conclut Charles Ronlez.