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Le traitement en question porte le nom de thérapie génique CAR-T, CAR pour Chimeric Antigen Receptor ou récepteur antigénique chimérique. Il s'agit d'une forme d'immunothérapie, disponible depuis quelques années. Cette thérapie utilise des lymphocytes cytotoxiques T (les cellules T tueuses), prélevées chez le patient. Elles sont ensuite génétiquement modifiées afin d'exprimer un récepteur capable de reconnaître un antigène tumoral. Au contact de cet antigène, les lymphocytes vont être activés et détruire les cellules tumorales. Le récepteur est qualifié de chimérique car il revêt une double fonction : incorporer l'antigène pour ensuite activer les lymphocytes T. La thérapie immunocellulaire CAR-T est actuellement utilisée pour traiter différents cancers hématologiques.Et pour le VIH ? En réalité, c'est l'inverse qui s'est produit. La thérapie CAR-T avait déjà été testée comme traitement contre l'infection au VIH bien avant qu'elle ne le soit pour le cancer. Sans toutefois avoir un impact sur le virus vu la capacité de ce dernier à modifier rapidement les régions de sa protéine de surface. Par conséquent, les lymphocytes T génétiquement modifiés ne sont plus capables de le reconnaître. Les chercheurs ont alors essayé de rendre les choses plus difficiles pour le virus en dotant les lymphocytes T non pas d'un, mais de deux récepteurs antigéniques chimériques. On parle de cellules duoCAR-T.Les premiers résultats de ce nouveau traitement sont plutôt encourageants. Lors de tests in vitro, les cellules duoCAR-T ont réussi à détruire efficacement les lymphocytes T infectés par le VIH. La même équipe de chercheurs a administré simultanément des injections de cellules CAR-T et de cellules infectées par le VIH à des souris dotées d'un système immunitaire humanisé - humanisé parce que les rongeurs ne peuvent normalement pas être infectés par le virus du sida. Une semaine plus tard, la rate de cinq souris sur six ne portait aucune trace du virus. Le taux viral moyen avait diminué de 97,5%.Place à présent aux tests cliniques et les chercheurs espèrent démarrer l'année prochaine une petite étude sur des patients infectés par le VIH. Ces derniers arrêteraient leur traitement antirétroviral et se verraient injecter à la place des cellules duoCAR-T. À terme, l'espoir est d'empêcher le VIH d'être réprimé.Même s'il porte ses fruits, un doute subsiste quant à la faisabilité du traitement. Si les traitements antirétroviraux engendrent des effets secondaires, c'est également le cas pour la thérapie génique CAR-T. Le syndrome de relargage cytokinique est l'un des risques encourus. Il provoque une réaction inflammatoire massive. La thérapie immunocellulaire CAR-T est par ailleurs précédée d'une chimiothérapie qui devra permettre au système immunitaire du patient d'exprimer des récepteurs afin que les lymphocytes T puissent atteindre leur effet maximal. La question est de savoir si ce traitement ne sera pas plus lourd pour les patients plutôt que la perspective d'un traitement antirétroviral à vie. Chez les malades du cancer, la thérapie CAR-T est souvent l'option la plus prometteuse.Les chercheurs n'ont rien laissé au hasard. Lors des expériences animales, ils n'avaient pas seulement traité les lymphocytes cytotoxiques (cellules CD8) avec des CAR. Ils avaient procédé de la même manière avec les lymphocytes T auxiliaires (cellules CD4). Ces dernières sont la cible privilégiée du VIH. Il est apparu que ces cellules CD4 conçues pour porter les CAR sont particulièrement résistantes au VIH.