" Je me suis investie corps et âme dans mon métier de pharmacienne et, lorsque j'ai décidé d'arrêter, j'ai longtemps réfléchi à ce que je voulais faire. Ouvrir un B&B demande un sérieux investissement ", raconte Katrien Vallaeys (62 ans) du B&B d'Apotheeke à Zwijnaarde - une base parfaite pour un city-trip à Gand.
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Le B&B d'Apotheeke a ouvert ses portes au mois d'août 2018. " Cela peut sembler étonnant, mais nous accueillons énormément de touristes néerlandais qui viennent explorer Gand. Avec le tram qui s'arrête à la porte, on est dans le centre en un clin d'oeil... et c'est bien pratique, car se garer en ville coûte une fortune. De nombreux hommes et femmes d'affaires qui travaillent dans les environs ont également découvert l'adresse. " Ce dernier groupe a été le premier à resurgir après le confinement. " Les clients professionnels restent généralement une semaine. Cela ne leur pose aucun problème de venir à Gand en voiture, ils arrivent le dimanche soir et ont encore le temps de travailler un peu. Ce type de clientèle m'apporte une certaine sécurité dans un contexte où le confinement et les directives sanitaires pour pouvoir rouvrir ont pesé très lourd. Nous affichions complet pour tout le printemps, car nous faisions partie des ambassadeurs de la grande exposition Van Eyck, mais toutes ces réservations ont dû être annulées. Et ce que j'ai remarqué depuis que nous avons rouvert nos portes au mois de juin, c'est que les gens réservent vraiment sur le tard ", observe Katrien Vallaeys. La pandémie n'a certes pas simplifié sa vie et son travail d'exploitante de B&B. " En temps normal, il y a de jolis coussins et des couvre-lits dans les chambres, mais nous les avons retirés pour ne prendre aucun risque. J'ai vu passer des travailleurs de la santé qui avaient besoin de souffler après la première vague... et quand on entend leurs histoires épouvantables, c'est vraiment un virus qu'on ne veut pas chez soi. Du coup, même si servir les petits- déjeuners séparément représente un surcroît de travail, cela me fait plaisir d'entendre que mes hôtes se sentent en sécurité. " Katrien Vallaeys est toujours aux petits soins pour ses clients. " Je ne m'arrête jamais: je fais mon pain, des biscuits, des confitures... Les hôtes disposent aussi d'un espace où ils peuvent s'installer pour lire ou pour travailler, ainsi que d'une terrasse. Nous servons aussi notre vin "maison". Laurens Deblaere, le fils de mon conjoint, est oenologue et produit ses propres côtes-du-rhône en Provence, que nous proposons dans notre B&B. " La maîtresse des lieux n'est pas non plus avare de conseils pour une visite à Gand, une promenade à vélo ou une bonne adresse culinaire à retenir pour le jour où les restos pourront rouvrir leurs portes. " Pour ceux et celles qui ne veulent pas aller trop loin après une journée dans le centre de Gand, il y a plusieurs bonnes tables à proximité. Et évidemment, nous recommandons aussi volontiers La Barriga, le nouveau foodbar de mon fils à Zevergem. " Un observateur attentif ne peut pas passer à côté des récipients en céramique et autres objets qui rappellent que ce bâtiment était autrefois une pharmacie, fondée en 1950 par le père de l'actuelle propriétaire. " Originaire de Poperinge, mon papa a fondé ici la première pharmacie du village. De son temps, le pharmacien était encore un notable au même titre que le curé, le médecin ou le maître d'école. Il nous a éduqués au respect de chacun. Je me souviens d'un jour où, en rentrant de l'école, j'ai traversé l'officine sans faire attention: papa m'a fait revenir parce que j'avais omis de lui dire bonjour et de saluer un client qui se trouvait là. Je me souviens aussi très bien que nous l'aidions parfois à remplir des gélules. En faisant de l'ordre, j'ai retrouvé ses vieux livres de recettes. C'est là qu'on se rend compte du nombre de magistrales qu'on préparait ici. " Une voie que Katrien Vallaeys connaît bien, puisqu'elle l'a empruntée. " Pour moi, il était évident que je ferais la pharmacie. Mon père est malheureusement décédé très jeune et je n'ai donc pu travailler que brièvement à ses côtés. À peine diplômée, je me suis retrouvée très rapidement à gérer seule une officine, mais j'ai toujours mis un point d'honneur à rester une pharmacienne "soignante", à l'écoute et respectueuse des patients. " Au cours des trois dernières décennies, elle a vu le secteur de la pharmacie changer du tout au tout. " J'ai beau le déplorer, force est de constater que certains accordent aujourd'hui beaucoup moins d'importance à l'aspect soignant du métier. On n'arrêtera plus la tendance de l'officine-guichet où on vient simplement chercher ses médicaments. En ce sens, j'admire mes jeunes collègues qui se retrouvent confrontés à la concurrence de mastodontes qui peuvent acheter une foule de produits de parapharmacie à moindre coût... mais cela ne m'a jamais empêchée d'encadrer les stagiaires dans l'esprit de notre officine axée sur les soins. " C'est d'ailleurs ainsi que Katrien Vallaeys a trouvé pour lui succéder une collègue animée des mêmes préoccupations. " Quand j'ai pris ma décision, le sort de mes patients a été l'une de mes plus grandes angoisses. Lorsque ma jeune collègue Ellen Cogge s'est proposée pour reprendre mon numéro, je me suis sentie libérée d'un poids, car elle travaille vraiment dans le même esprit. Je vais d'ailleurs volontiers l'aider de temps en temps. Pour moi, c'est aussi une manière de revoir les patients chez leur nouvelle "pharmacienne de référence". Malgré l'urbanisation croissante, Zwijnaarde reste en partie un village. La boulangerie, la pharmacie, la vie associative (Katrien Vallaeys est la présidente de l'harmonie locale, ndlr) sont autant de lieux de rencontre qui favorisent l'intégration et qu'il est donc important de préserver. "