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Ses clichés en noir et blanc superbes sont encore accrochés aux cimaises de la Box galerie, avant que les " couleurs " ostendaises (à partir du 13 juin) ne prennent le relais de la " saudade " cubaine et de l'effervescence napolitaine, saisies, pour la plupart des images, au début des années 90. Une ville comme Naples décrite d'abord au travers de ses habitants : on est à la fin du siècle dernier, mais cela pourrait être les années 50 ; Lambert fait montre d'une furtivité de regard à la Doisneau et son "instant décisif", lorsque Via Dei Tribulani il saisit un groupe de garçons que l'on croirait sortis de l'immédiate après-guerre. Via Giuseppe rend parfaitement compte de l'aspect grouillant, braillard, constamment en mouvement de cette cité volcanique. À Ercolano, son appareil capture, sur le vif, le passage du sosie altier de la jeune et romaine Anna Magnani. Enfin, Megellina semble sortir d'une scène de voiture de Huit et demi de Fellini : en avant-plan, des amants, protégés par l'habitacle, se parlent dans leur bulle de métal alors que, dehors, dans la nuit, le boulevard, ses lumières criardes et sa circulation incessante, continuent de rugir : l'impression d'un driving-movie à l'envers dont le film urbain sera projeté à l'arrière du véhicule, et dont les occupants n'auraient cure. Une nostalgie quasi contemporaine entoure également le portrait réalisé quelques années plus tard à peine de La Havane. Les images de Lambert semblent le pendant photographique de la musique du Buena Vista Social Club : une beauté décatie s'en détache, le vieux parfum d'une richesse disparue, notamment dans la photo de ce vieil homme au regard las et triste portant un énorme bouquet de fleurs sur l'épaule. Décatie aussi cette vielle dame dans l'encoignure d'une porte et de la photographie, aux côtés de celle encadrée et trônant au centre d'elle-même jeune. Une jeunesse très années 50, saisie dans le reflet du cinéma Payret : un regard boudeur sous une vieille horloge, symbole d'un temps cubain toujours arrêté, voire emprisonné. Mais outre une mélancolie certaine, une poésie inonde ces images comme cette photo de l'onde provoquée par la nage d'un jeune garçon sur l'océan devant le front de mer de " Malecon " à La Havane. Le même " Malecon " est le sujet du seul cliché sans présence humaine : la photographie du bord embrumé par les gouttelettes de l'orage qui s'éloigne et lui donne l'air embué d'un tableau de Turner, voire d'une marine d'Ensor... Ce qui conduit à Ostende.Expositions Yvon Lambert : ? I. Cuba/Napoli jusqu'au 6 juin ? II. Ostende du 13 juin au 11 juillet Box Galerie 102 chaussée de Vleurgat, 1050 Bruxelles, 02-537.95.55 info@boxgalerie.be, www.boxgalerie.be www.facebook.com/boxgaleriebruxelles Du mercredi au samedi de 14 à 19 heures