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On le sait, le confinement s'est traduit par une augmentation des violences conjugales et familiales. Le numéro d'urgence, le 0800-30.030, a reçu deux à trois fois plus d'appels par rapport à la moyenne habituelle et 93% des coups de fil étaient passés par des femmes qui se sont retrouvées isolées avec leur bourreau. Ce service anonyme d'écoute et d'accompagnement n'est pas habilité pour intervenir en cas de danger et, si nécessaire, il invite les victimes à appeler directement la police. En Europe, les services d'urgence ont enregistré jusqu'à 60% d'appels en plus. Devant cette situation, la France et l'Espagne ont mis en place, dès mars, un dispositif qui permet aux victimes de signaler ces faits en pharmacie. Ainsi, lorsqu'une femme dit vouloir acheter un " masque 19 ", le pharmacien compose directement un numéro d'urgence. En Belgique, vu l'absence de décision fédérale actant un tel système d'alerte dans les pharmacies, des initiatives régionales ont été lancées : en Flandre, le projet " Masker 19 " est soutenu par le VAN (Vlaams Apothekersnetwerk) ; en Région bruxelloise, certaines communes ont aussi lancé le projet " Masque 19 ", en collaboration avec l'UPB et les CPAS ; et à Mons, l'UPHOC y sensibilise également les pharmaciens. Dès la mi-avril cependant, la Taskforce stratégique corona a décidé de soutenir " Masque 19 " et un code CNK a été créé, l'objectif étant de mesurer si le pharmacien peut avoir un rôle social dans le signalement des violences intrafamiliales. Les choses commencent donc à bouger : il est temps diront d'aucuns étant donné que nous sommes en phase de déconfinement ! Ceci dit, une fois officialisé, ce système aura au moins le mérite d'exister. Ainsi, le 20 mai, un débat a eu lieu au Parlement bruxellois. Il existe aussi au niveau national à la Commission santé où trois propositions de loi ont été déposées par le PS, Défi et le PTB. Il était prévu d'en discuter le 25 mai dernier, malheureusement l'agenda n'a pas été respecté. Quoiqu'il en soit, contactée par ces parlementaires, l'APB a précisé sa position sur ce sujet : " Le pharmacien joue un rôle social très important, il est en première ligne pour orienter les gens, non seulement en cas de problèmes de santé mais aussi sociaux. Notre proposition c'est de dire que les pharmaciens peuvent devenir des centres d'orientation en ce qui concerne les violences conjugales, mais on estime que pour la prise en charge concrète, il faut s'adresser aux services compétents ", explique Alain Chaspierre, secrétaire général de l'APB. " Nous plaidons pour que, au niveau local, provincial, régional, un répertoire des acteurs concernés soit fourni aux pharmaciens pour qu'ils puissent, en fonction des situations, orienter les personnes qui se signalent victimes à la pharmacie vers une prise en charge adéquate. C'est un rôle relais que l'on peut assumer, dans les limites de nos compétences. Nous pouvons jouer ce rôle d'orientation, d'ailleurs décrit dans le cadre pluriannuel ". " Quoiqu'il en soit, insiste-t-il, il faut évidemment avoir une concertation avec notre secteur pour que la méthodologie, les modalités et le protocole d'orientation soient clairs (dans quel cas contacter la police, est-ce la tâche du pharmacien...). Nous pouvons même organiser des formations si nécessaire. Il y a des expériences dans certaines communes (Mons par exemple, voir plus loin). Pourquoi ne pas les considérer comme projets pilotes et en tirer les enseignements ? C'est également le cas avec des expériences étrangères ". Enfin, l'APB souhaite qu'une communication claire soit organisée vers le grand public afin d'expliquer cette nouvelle fonction du pharmacien. " On a créé un CNK quand il y a eu tout ce déballage dans la presse pour que, si les pharmaciens étaient contactés à ce sujet, on puisse avoir un aperçu au niveau national et voir si c'est un phénomène fréquent ou anecdotique. C'est utilisé dans certaines communes pour un service négocié avec les pharmaciens ", indique Alain Chaspierre. À Mons, le CPAS a contacté l'UPHOC (Union pharmaceutique du Hainaut occidental et central) pour que les pharmaciens renvoient vers le numéro d'appel spécifique du CPAS en cas de détection de violences conjugales dans leurs officines. " Pour ce faire, on a transmis à tous les pharmaciens de la zone de Mons une affiche et une lettre explicative pour les sensibiliser à ce problème et, en cas de besoin, soit transmettre le numéro de téléphone à la personne, soit téléphoner directement au service du CPAS ", explique Charles Ronlez, directeur de l'UPHOC. Ici, pas de mot de passe " Masque 19 ". " On a mis cela en route au tout début du confinement, on n'avait pas établi de mot de passe. Il s'agit simplement d'une sensibilisation des pharmaciens. Avoir un mot de passe pourrait être utile parce que ce serait plus discret pour les victimes, pour oser exprimer leur problème dans l'officine. Si quelqu'un utilise ce mot de passe, quelle doit être notre réaction ? Il faut aussi un peu de formation pour les prestataires de soins qui sont dans cette situation, pour savoir comment réagir... ", considère-t-il. Cette initiative a été plutôt bien accueillie par la soixantaine de pharmacies du grand Mons duquel dépend le CPAS, estime Charles Ronlez : " J'ai essayé de faire un bilan à la mi-mai mais je n'ai pas encore eu de retour de la part du CPAS pour savoir s'il y avait eu une recrudescence de l'utilisation de ce numéro de téléphone et si cette augmentation était due à un contact lié à une pharmacie ".farmaflux.be, www.cpas.mons.be