Services aux patients, transformation numérique, développement durable... la pharmacie d'officine est en pleine mutation. Avoir des pratiques éthiques et responsables, personnaliser l'offre et adopter les technologies intelligentes, font partie des clés de la pharmacie du futur.
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Vous avez dit "servicielle"? Depuis quelques années, le métier de pharmacien d'officine se transforme à mesure que de nouvelles missions lui sont confiées. Tant pour l'accompagnement du patient au bon usage des médicaments, que pour la vaccination, la révision de médication, le dépistage, la prévention voire la téléconsultation. La pandémie du Covid-19 a été un moment clé dans cette évolution, les pharmaciens ont montré qu'on pouvait compter sur eux en temps de crise. Ils ont démontré leur capacité à étendre leurs compétences par la réalisation d'actes médicaux comme la vaccination et les tests antigéniques, et sont de fait devenus acteurs de soins et de prévention. Ces rôles sont des leviers essentiels pour fidéliser les patients: être à leur écoute, améliorer leur parcours de soin (par exemple, via la tenue à jour de la liste des médicaments), personnaliser les prestations et insister sur la proximité. Ce dernier aspect est particulièrement apprécié par les patients qui ont par exemple très bien compris l'intérêt de la vaccination en pharmacie, louant l'accessibilité et la facilité du service: point de contact proche du domicile, prise de rendez-vous aisée et larges plages d'heures d'ouverture. Aujourd'hui, les patients sont en demande de produits et services personnalisés adaptés à leurs besoins spécifiques. La santé et le bien-être sont des paramètres qui influencent de plus en plus le mode de vie et le comportement d'achat, d'où par exemple le succès des produits à base de plantes et des aliments fonctionnels. Et ce n'est pas qu'une mode passagère, mais un changement fondamental dans les priorités des consommateurs. Cette tendance trouve ses racines dans une combinaison de facteurs tels qu'un accès accru à l'information relative à la santé, une augmentation des problèmes de santé chroniques et une attention croissante à la prévention. C'est ici qu'intervient le second néologisme: "phygitale". La nouvelle mission de vaccination répond bien à cette dimension alliant à la fois le contact physique et le digital pour la prise de rendez-vous et pour la mise à jour du dossier patient. À une époque où le temps est un produit précieux, la demande de commodité et de rapidité devient un déterminant clé. "Phygitale" renvoie également à la présence digitale de la pharmacie. Un indispensable qui passe autant par les réseaux sociaux (voir page 46) que par un site web, outil d'information, de service et d'e-commerce. Le numérique permet le développement de la vente en ligne, la transformation du back office, le suivi des commandes, la gestion des stocks, la traçabilité des produits... "La pharmacie d'officine est confrontée à des défis comme l'uberisation du secteur avec l'essor des plateformes en ligne de commande de médicaments. Face à cette concurrence, les pharmacies doivent développer des services innovants pour fidéliser leur clientèle et maintenir leur activité. (...) En automatisant certaines tâches telles que la commande et la livraison de médicaments, les pharmaciens peuvent désengorger leur officine, gagner du temps et se concentrer sur d'autres missions", analysent Les Échos(1). "Cependant, la transformation numérique ne doit pas être considérée comme une fin en soi. Elle doit être mise au service d'une meilleure expérience patient et d'une meilleure qualité de soins. Les pharmacies doivent donc être attentives à la qualité de leur service et à l'accompagnement de leurs patients dans l'utilisation de ces nouvelles solutions numériques", ajoutent-ils. D'autant que la population est de plus en plus sensibilisée à la confidentialité des données personnelles. C'est autant une exigence réglementaire qu'un impératif stratégique dans un monde où les données sont la nouvelle monnaie et où les frontières entre le monde physique et le monde numérique s'estompent. Les progrès de la réalité augmentée, de la réalité virtuelle et de l'IA (intelligence artificielle) remodèlent en effet la façon dont les consommateurs interagissent avec leur environnement. La pharmacie devra prendre le train de cette nouvelle ère d'expériences numériques et augmentées, interactives et personnalisées. Enfin, la pharmacie se doit aujourd'hui d'être "éco-responsable". De plus en plus de patients sont attentifs à cet aspect, il faut pouvoir répondre à ces nouvelles attentes et adopter des pratiques responsables en matière d'environnement et d'éthique. En officine, les enjeux du développement durable passent par l'offre de produits bio/éco-labellisés, disponibles en vrac, mais aussi par le recyclage, l'agencement vert des locaux, la mobilité... Autre tendance croissante, le localisme, soit la préférence pour les biens produits localement, qui allie à la fois un souci pour la durabilité, le soutien aux économies locales et la traçabilité des produits. Selon un rapport Nielsen, 73% des consommateurs disent qu'ils changeraient leurs habitudes de consommation pour réduire leur impact environnemental. Quant à la responsabilité sociétale, elle suppose d'agir en veillant à la qualité des produits, en respectant les normes sanitaires, en favorisant des pratiques éthiques et responsables dans la chaîne d'approvisionnement, ou encore en proposant des services adaptés aux personnes en situation de handicap ou en difficulté, tout en n'oubliant pas l'inclusivité et la diversité. Toutes ces mutations, allant des pratiques durables aux expériences numériques et personnalisées, ne sont pas des phénomènes fugaces, elles changeront significativement le paysage de la pharmacie de demain.