Existe-t-il un lien éventuel entre l'exposition pré-conceptionnelle à la metformine, pendant la spermatogénèse, et le risque de malformations congénitales majeures? Et quid de la prise de metformine durant la grossesse?
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Il est vrai qu'on parle souvent de l'importance de la santé maternelle dans la conception, mais qu'en est-il de la santé paternelle? Est-elle sans conséquence sur le développement des bébés et leur santé? La metformine est un traitement du diabète de type 2 largement répandu aujourd'hui chez les jeunes. Si on connaît bien son mécanisme d'action, on a souvent tendance à négliger les conséquences qu'elle peut avoir sur d'autres organes que le foie et plus précisément sur l'appareil reproducteur masculin. Or, la metformine pourrait augmenter la phosphorylation de la protéine kinase impliquée dans la spermatogenèse. Certaines études épidémiologiques se sont penchées sur la prise de metformine chez des diabétiques jeunes en âge de procréer. Que disent-elles? Une étude de cohorte danoise, publiée en 2022, montre qu'il pourrait exister une association entre l'exposition paternelle à la metformine avant la conception et le risque de malformations congénitales majeures chez l'enfant à naître, notamment quand il s'agit d'un garçon. Une autre étude, israélienne, conduite en 2024, et portant sur 383.851 bébés nés entre 1999 et 2020, présente quant à elle des résultats plus nuancés. Elle montre d'une part que l'exposition paternelle pré-conceptionnelle à la metformine dans les analyses non ajustées a été associée à un risque accru de malformations congénitales majeures, l'odds ratio (OR) " brut " ou rapport de chance étant estimé à 1,28. Les ajustements prenant en compte la morbidité cardiovasculaire et métabolique paternelle ont ramené ce rapport à une valeur plus basse (1,00), ce qui semble exclure tout risque significatif. D'autre part, en cas de monothérapie avec la metformine, l'OR est descendu à 0,86 pour remonter à 1,36 lors de traitements plus complexes tels qu'en l'espèce, l'association de metformine et de sulfamides hypoglycémiants ou insuline, cette éventualité thérapeutique rendant le contrôle glycémique plus compliqué qu'en cas de monothérapie avec la metformine. Néanmoins, à l'heure où le diabète de type 2 est de plus en plus fréquent chez les jeunes hommes, il semble plus prudent, au vu des connaissances actuelles, de programmer un arrêt de la metformine quand un homme diabétique envisage de devenir papa. L'utilisation de la metformine durant les trois premiers mois de grossesse semble encore poser question même après des décennies d'existence. Si la plupart des méta-analyses sont assez rassurantes, on ignore encore si le passage transplacentaire de la metformine est tout à fait dénué d'effets potentiels sur le développement du foetus au long cours. Une étude d'observation américaine portant sur plus de 12.000 femmes enceintes diabétiques de type 2 diagnostiquées et traitées avant la grossesse avec de la metformine a comparé l'incidence des malformations en répartissant les participantes en deux groupes. Une insulinothérapie a été instaurée chez toutes ces femmes et, dans les 90 jours suivant les dernières règles, la metformine a été soit maintenue (n = 1557) soit interrompue (n = 850). Les résultats montrent d'une part qu'il n'y a pas eu plus d'enfants mort-nés dans le groupe sous insulinothérapie en monothérapie que dans le groupe sous insulinothérapie combinée à la metformine. D'autre part, la comparaison de l'incidence des malformations congénitales majeures (le plus souvent cardiaques) a montré un rapport de risque de 0,72. À la vue des résultats actuellement disponibles, il semblerait que la prise de metformine au cours du premier trimestre de la grossesse n'ait pas d'effet tératogène.