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363 lits justifiés, 15.000 journées d'hospitalisation, 1.200 collaborateurs... dont 4 pharmaciens, 9 assistants, 2 secrétaires et 2 magasiniers à la pharmacie. Engagé dans un processus d'accréditation depuis juin 2015, le CH Mouscron est le premier hôpital général wallon à avoir été accrédité (décembre 2016, référentiel ACI version 3). Son accréditation or sous référentiel version 4 vient d'être confirmée en décembre dernier."La grande différence entre la version 3 et 4 du référentiel c'est essentiellement l'aspect 'excellence et service' où un nombre important d'éléments neufs intègrent une participation du patient et de sa famille. C'est un domaine très innovateur pour un pays comme la Belgique et, contrairement aux Canadiens qui ont mis 22 ans pour passer de la version 3 à 4, nous avons dû le faire en moins d'une année ! Sur 1.938 critères, le CH en a validé 1.854, soit environ 96%", se réjouit Valérie Nizet, pharmacienne hospitalière chef de service."Dans le chantier médicaments, les grosses différences concernaient les POR (Pratiques Organisationnelles Requises) : dans la version 3, la gestion des antibiotiques, des médicaments à haut risque (MHR), de l'héparine et des narcotiques avait le niveau platine, celle des électrolytes concentrés et les abréviations, le niveau or. Dans la version 4, elles sont toutes passées niveau or".Certaines choses étaient déjà en place et ont été poursuivies comme la possibilité pour la pharmacie d'avoir accès au dossier patient et la prescription informatisée.Après deux tours d'accréditation, plusieurs améliorations sont actées : la création et la diffusion d'une liste des MHR ; l'analyse des prescriptions en tenant compte des contreindications, des allergies et du poids du patient; l'établissement de statistiques concernant les interventions et leur diffusion ; la composition, la révision et la diffusion de procédures (surtout pour les chimios) ; le contrôle des bacs des chariots des unités de soins (environ 4% d'erreurs au niveau de la pharmacie, passés à 3,2% lors de la 2e accréditation) et déclaration des erreurs de la pharmacie ; la mise en place de sachets spécifiques pour les stupéfiants et de sachets bleus pour les frigos et verts pour les médicaments du domicile du patient ; l'étiquetage en rouge des MHR ; les feuillets patients (anticoagulants et anticancéreux oraux...) ; l'intensification des formations données par la pharmacie ; la visite de la pharmacie pour tous les nouveaux engagés ; la révision du chapitre comité médicopharmaceutique (CMP) ; la mise en place d'un système de bacs amovibles permettant un reclassement par ordre alphabétique quand une rupture de stock entraîne le remplacement d'une spécialité par une autre ; l'ouverture des armoires à stupéfiants par badge...L'inventaire des stupéfiants à la pharmacie est fait une fois par semaine, ainsi que dans les unités de soins. " Au début, tous les services n'avaient pas pris ce pli, mais le mot 'accréditation' permet de faire bouger les choses..., note la pharmacienne. En pharmacie clinique, on voyait les patients ortho de plus de 65ans en préhospitalier mais, pour la 2e accréditation, on a changé de projet, on surveille les antibiotiques "." Avoir le meilleur schéma thérapeutique possible reste un problème relativement catastrophique. On a beaucoup d'outils qui devraient nous permettre de savoir ce que le malade prend, mais malheureusement le seul système qui est fonctionnel c'est le dossier pharmaceutique partagé auquel le pharmacien hospitalier n'a pas accès ", se désole le Dr Philippe Gadisseux, référent qualité." Pour la première accréditation, indique-t-il, on a fait des affiches, des réunions de médecins, une liste de médicaments à remplir par le patient et par le médecin, mais il y a toujours énormément de difficultés. Lors de la dernière accréditation, on a fait une campagne qui rappelle aux patients, par SMS chaque fois qu'il a rendez-vous, de ramener sa liste de médicaments. On a convaincu les pharmaciens de ville de répondre à nos appels téléphoniques et de publier sur un site sécurisé, visible à l'hôpital, la liste des médicaments que le patient a pris les derniers mois. L'idée est de transmettre électroniquement la fiche de médicaments de sortie de l'hôpital à la pharmacie de ville habituelle du patient "."Pour la gestion des médicaments, on a dû revoir pas mal de choses et notamment la distribution des médicaments afin de réduire le nombre d'erreurs : obligation des soignants de noter tous les ordres médicaux reçus dans le dossier de soins, de déblistériser les médicaments auprès du patient, d'encoder la distribution médicamenteuse en temps réel...", explique Isabelle Verstraete, infirmière.Dans cette chasse aux erreurs médicamenteuses, l'équipe infirmière a cherché un moyen pour ne plus être interrompue lors de la distribution des médicaments, ce qui arrive jusqu'à 7 fois par heure. " Pour alerter les patients en leur disant 'ne me dérangez pas, je suis occupée à une tâche à haut risque', on a tenté le gilet jaune (qu'on a pris en orange vu les événements en France), cela n'a pas fonctionné... Il faut revoir toute notre organisation et savoir dire 'non', c'est une culture collective avec une vraie culture d'entreprise et un vrai travail de sensibilisation des patients, des familles et des professionnels de santé ", ajoute-t-elle.Parmi les nombreuses réflexions à mener, celle sur l'automédication, un concept en contradiction avec la responsabilité du soignant et la notion du patient acteur de sa santé et autonome, ou encore celle sur le protocole de gestion des escarres avec des produits comme les huiles essentielles... Sans oublier les problèmes d'infrastructure tels que l'accès trop facile aux zones médicamenteuses dans les unités, les chariots médicaments usés..." Le processus d'accréditation fait donc avancer les choses, celle de 2016 a été un vrai tremplin : ce référentiel est un support pour progresser, il nous oblige à pratiquer un travail standardisé et à structurer nos pratiques. Pour diminuer les risques, il faut considérer le circuit du médicament dans son ensemble, aussi bien logistique que clinique. Le mot 'accréditation' est vraiment magique parce qu'il permet de débloquer certains points qui coinçaient", précise Valérie Nizet." Le point négatif c'est que ce n'est pas toujours adapté à la Belgique. Les Canadiens ont des moyens que nous n'avons pas, des pharmaciens à tous les étages... La grande différence entre les deux référentiels c'est vraiment que le patient et sa famille deviennent acteurs du trajet de soins du patient, ce qui n'est pas toujours facile à mettre en place. Le CH Mouscron a la volonté de ne pas enjoliver les choses pour avoir l'accréditation mais, même avec une toute petite équipe, c'est possible. On a réussi à le faire !", conclut la pharmacienne.