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Un tiers des cas de démence dans le monde serait attribuable à des facteurs de risque potentiellement modifiables. Oui mais sur quoi agir? L'étude européenne H2020 Silver Santé, coordonnée par l'Inserm (France), a étudié l'impact d'un programme de 8 semaines de méditation pleine conscience (mindfulness) ou d'autogestion de la santé sur l'anxiété, laquelle est associée à un risque accru de démence. L'ULiège participe à ce projet, par l'intermédiaire du centre d'imagerie GIGA-CRC. Meditaging "Au Centre de recherche du cyclotron (CRC), on s'est lancé dans ce programme de recherche pour déterminer les facteurs qui influencent un vieillissement optimal. Nous sommes spécialisés dans le vieillissement cognitif: comment nos fonctions de mémoire, d'attention etc. se modifient avec l'âge, même en l'absence de pathologie neurodégénérative. Des recherches explorent par exemple les liens avec le sommeil ou la génétique. Ici, l'idée était de partir sur un autre facteur potentiellement protecteur, la pratique de la méditation, même si l'étude H2020 Silver Santé ne concernait pas que l'aspect cognitif, elle portait de façon globale sur le bien-être", explique Fabienne Collette, neuropsychologue. Deux études ont été réalisées dans le cadre de ce projet européen: la première dont les premiers résultats viennent d'être publiés dans Psychotherapy & Psychosomatics (avril 2021, Marchant & al.) visait à analyser l'effet d'un programme de méditation pleine conscience de 8 semaines sur des volontaires qui présentaient un déclin cognitif subjectif (problèmes de mémoire auto-perçus qui ne peuvent être objectivés par des tests). Dans la seconde étude, des personnes âgées qui n'avaient pas de plaintes cognitives ont suivi un programme de 18 mois de méditation. Cette intervention était comparée à l'apprentissage de l'anglais et à un groupe contrôle, les résultats paraîtront dans les mois à venir. "La première publication concerne donc des patients qui ont l'impression d'avoir un déclin de leurs capacités cognitives. Souvent, ces personnes sont très anxieuses, l'idée était donc de voir si ces deux programmes (méditation et éducation à la santé) permettaient de jouer à la fois sur le niveau d'anxiété et sur le fonctionnement cognitif. Une anxiété ou une dépression cliniques étaient des critères d'exclusion, nous avons recruté des sujets anxieux à propos de leurs difficultés mais non pathologiques. On a comparé la pleine conscience à un programme de 8 semaines d'éducation à la santé basé sur un manuel de conseils pour aider les malades chroniques à mieux gérer leur quotidien (faire plus d'activités physiques, avoir une alimentation plus saine, plus de relations sociales, améliorer la prise des médicaments...). Les deux groupes suivaient une session hebdomadaire et devaient ensuite mettre en pratique ce qu'ils avaient appris pendant la semaine (1h/j)", détaille-t-elle.Résultats?Le niveau d'anxiété des volontaires a été mesuré avant, directement après les sessions de cours et à nouveau six mois plus tard. Les résultats ont montré que les niveaux d'anxiété avaient diminué directement après les cours, que cette diminution se maintenait six mois plus tard et qu'après l'intervention, plus de la moitié des participants de chaque groupe a continué à faire ce qu'ils avaient appris. Aucune différence dans la réduction de l'anxiété n'a été constatée entre les groupes."Comme notre hypothèse était que la méditation serait plus efficace que l'éducation à la santé, nous étions un peu déçus mais, la bonne nouvelle c'est qu'on a montré qu'il y a deux interventions qui peuvent jouer sur l'anxiété liée aux plaintes subjectives sur la mémoire chez les personnes âgées et que finalement, en fonction de ce qu'elles préfèrent, qu'elles choisissent l'une ou l'autre, ça marche!", se réjouit la chercheuse. Dans cette étude-ci, il n'y avait pas de groupe passif (qui ne reçoit aucune intervention), contrairement à la seconde. "Pour s'assurer qu'il y avait quand même un effet, on a comparé nos données à celles de la littérature. Dans les travaux sur le mindfulness, il n'y a souvent qu'un contrôle passif. Quand on sélectionne les études qui ont porté sur le vieillissement, on voit que le niveau d'anxiété a tendance à augmenter au cours de l'intervention dans le groupe contrôle. Nous avons donc des preuves indirectes selon lesquelles, si on avait eu un groupe contrôle, on y aurait vu une augmentation du niveau d'anxiété". Keep calm and exerciseCette étude donne ainsi des balises sur les stratégies que l'on pourrait mettre en place en prévention. "Des études ont montré que de hauts niveaux d'anxiété sont un facteur de risque pour le développement d'une démence. Par conséquent, jouer sur ce niveau en terme de prévention devrait avoir un effet positif sur la survenue d'une démence, dans le sens où cela diminue la probabilité de sa survenue. Sur base de la littérature, cela semble positif mais il est probable que d'autres choses fonctionnent aussi (yoga, danse...). De toute façon, l'idée globale est que si on veut bien vieillir, il faut rester actif et ne pas trop stresser!", conclut Fabienne Collette. Cherche volontairesLe Centre de Recherches du Cyclotron de l'Université de Liège recherche en permanence des volontaires motivés pour participer à diverses recherches dans le domaine des neurosciences. Les personnes intéressées peuvent obtenir plus d'informations au 0494-18.17.62 ou par mail agitude@uliege.be