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Les agonistes des récepteurs des benzodiazépines (BZRA, c'est-à-dire les benzodiazépines et z-drugs) ont montré un équilibre défavorable entre les risques (par exemple, chutes, fractures de la hanche, délire) et les bénéfices (réduction de l'anxiété, réduction du temps d'endormissement), en particulier chez les personnes âgées. Or, ces médicaments leur sont couramment prescrits en dépit de ce rapport risque-bénéfice défavorable. On sait que l'heure est à la déprescription de ce type de produits et les hospitalisations peuvent constituer une occasion unique d'initier leur arrêt. Une équipe internationale, menée par François-Xavier Sibille, du CHU UCL Namur et du Clinical Pharmacy Research Group du Louvain Drug Research Institute (UCLouvain), a mesuré la prévalence de l'utilisation des BZRA avant l'hospitalisation et le taux d'arrêt 6 mois plus tard, et a identifié les facteurs associés à ces résultats.Pour ce faire, ces chercheurs ont effectué une analyse secondaire d'un essai contrôlé randomisé en grappes (OPERAM, OPtimising thERapy to prevent Avoidable hospital admissions in the Multimorbid elderly), comparant les soins habituels et l'optimisation de la pharmacothérapie à l'hôpital chez des adultes âgés de 70 ans ou plus souffrant d'affections chroniques (3 ou plus) et polymédiqués (5 médicaments ou plus) dans quatre pays européens (Belgique, Irlande, Pays-Bas et Suisse). L'intervention comprenait un historique structuré de la médication, une revue de la médication (critères STOPP), suivis d'une prise de décision partagée avec les participants et le médecin traitant, et d'un rapport au médecin généraliste. La prise de BZRA a été définie comme la prise d'une ou plusieurs benzodiazépines ou z-drugs avant l'hospitalisation et leur absence lors du suivi à 6 mois. Une régression logistique multivariable a été effectuée pour identifier les facteurs associés à leur consommation avant l'hospitalisation et à l'arrêt du traitement après 6 mois.Qu'a trouvé cette équipe? Parmi les 1.601 participants pour lesquels les données de suivi à 6 mois étaient complètes, 378 (23,6%) utilisaient des benzodiazépines et médicaments apparentés avant l'hospitalisation. Le sexe féminin, un niveau déclaré plus élevé de dépression/anxiété, un nombre plus élevé de médicaments quotidiens, l'utilisation d'un antidépresseur ou d'un antiépileptique, et le site de l'essai ont été associés à l'utilisation de ce type de molécules. En revanche, le diabète sucré était associé à une plus faible probabilité d'utilisation de BZRA. Enfin, 86 patients qui consommaient des BZRA (22,8%) ont cessé d'en prendre. L'utilisation d'antidépresseurs et des antécédents de chute au cours des 12 mois précédents étaient associés à une plus forte probabilité d'arrêt de ce type de médicament, mais la maladie pulmonaire obstructive chronique (BPOC) était associée à une plus faible probabilité d'arrêt."La prévalence des benzodiazépines et z-drugs était élevée chez les personnes âgées multimorbides incluses, et près d'un quart d'entre elles ont cessé d'en prendre dans les 6 mois suivant l'hospitalisation. Des programmes ciblés de déprescription de ces médicaments pourraient encore améliorer l'arrêt ou la réduction de la dose, en s'attaquent aux barrières au niveau du patient, des professionnels de la santé et de l'organisation. Les études futures devront également accorder une attention particulière aux adultes plus âgés qui prennent des médicaments psychotropes, aux femmes et à la comorbidité de la BPOC", concluent les auteurs dont l'étude vient de paraître dans Drugs & Aging (2023;40:551-61).