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Selon l'enquête conduite par le Groupement pharmaceutique de l'UE (GPUE, PGEU) dans 29 États (27 membres de l'UE + 2 États candidats), chaque pharmacie d'officine en Europe passe en moyenne près de 7 heures par semaine à gérer les pénuries et à trouver des solutions alternatives pour les patients. Ce surcroît de travail a atteint un maximum par rapport aux trois années antérieures.Quelles sont les solutions mises en oeuvre? Recourir aux génériques (pour 27 pays), rechercher des sources d'approvisionnement alternatives ou faire des préparations magistrales (18 pays) et ajuster la posologie (16 pays). La gestion des pénuries se traduit aussi pour les équipes officinales par de la fatigue et de la démotivation, et par une moindre confiance des patients.Premiers décèsParmi les commentaires faits par les participants à cette enquête, la Belgique mentionne que "le nombre de médicaments indisponibles est stable mais qu'il y a davantage de pénuries de médicaments très couramment utilisés. Ce dernier point donne, surtout au niveau des patients, le sentiment que le problème s'aggrave de jour en jour.""Les pharmaciens communautaires font des efforts supplémentaires pour assurer la continuité des soins et minimiser l'impact négatif des pénuries sur la santé des patients, mais la situation devient de plus en plus compliquée", estime le président du PGEU, Koen Straetmans dont on a pu lire l'interview dans notre édition du 16 février. Les résultats montrent en effet que la situation s'est dégradée significativement par rapport à l'année précédente, qui était déjà à un niveau très élevé de pénuries: 6,68h/sem vs 5,3h en 2021.Les ruptures affectent désormais un grand nombre de médicaments et toutes les catégories de dispositifs médicaux (DM). Le nombre de ruptures d'approvisionnement a augmenté dans 3/4 des États répondants et aucun n'a connu d'amélioration. Pour 1/4 des pays, plus de 600 médicaments étaient manquants au moment de l'étude, soit une nette aggravation par rapport à 2021, à la même période. Toutes les classes thérapeutiques sont concernées, à commencer par les médicaments du système cardiovasculaire, du système nerveux central et les anti-infectieux (antibiotiques compris).Dans la quasi-totalité des États (27/29), cette détérioration s'est traduite par encore plus de désarroi et d'inconfort pour les patients, mais aussi par des arrêts de traitement, des surcoûts, des pertes d'efficacité thérapeutique, des erreurs médicamenteuses et des effets indésirables. Pour la première fois, 4 pays ont même mentionné des décès.Deux pays sur trois ont également connu des ruptures d'approvisionnement en DM et en dispositifs de diagnostic in vitro (DMDIV). Bien que les systèmes de suivi des pénuries de DM soient moins performants que pour les médicaments, ces ruptures ont été constatées pour toutes les catégories de DM dispensées à l'officine (classes I (bandages, thermomètres, masques chirurgicaux...), IIa (aiguilles, lentilles de contact...) et IIb (concentrateur d'oxygène)).Mesures audacieuses et ambitieusesPour le GPUE, les causes profondes du problème sont diverses et complexes: mondialisation de la fabrication des produits pharmaceutiques, stratégies de fixation des prix et autres dynamiques de marché, et crise actuelle des matières premières (matériaux d'emballage tels que l'aluminium pour les blisters ou le carton)."De plus, au cours des dernières semaines, la recrudescence des infections respiratoires a entraîné une augmentation de la demande d'antibiotiques tels que l'amoxicilline, notamment pour usage pédiatrique, et les ruptures d'approvisionnement actuellement signalées dans certains pays nécessitent des actions immédiates et concrètes", estime le GPUE."Nous appelons les responsables politiques européens et nationaux à adopter des mesures audacieuses et ambitieuses pour s'attaquer efficacement au problème. Il est nécessaire d'accorder aux pharmaciens plus de flexibilité pour trouver des solutions alternatives lorsqu'un médicament est en pénurie afin qu'ils puissent mieux gérer les soins aux patients, en utilisant pleinement leurs compétences, leurs connaissances et leur expérience", insiste Koen Straetmans. "Il est également essentiel d'améliorer les rapports, le suivi et la communication sur les pénuries de médicaments. Il est crucial de fournir plus de ressources à l'Agence européenne des médicaments (EMA) pour développer des activités sur la prévention et la gestion des pénuries en coordination avec les États membres. Le GPUE appelle à développer des mécanismes équitables de redistribution des médicaments disponibles sur le marché européen aux patients qui en ont le plus besoin, quel que soit le pays de l'UE où ils vivent, en particulier en période de crise sanitaire. Enfin, il est nécessaire d'assurer le respect effectif des lois européennes et nationales relatives aux obligations de service public des acteurs de la chaîne d'approvisionnement."