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Fin août 2021. À la veille du Mémorial Van Damme, le Louvaniste est en route pour un événement à Sankt Wendel, dans le Land de la Sarre en Allemagne. "Avoir la chance de faire de l'athlétisme mon métier est un honneur et une opportunité que je ne voulais pas laisser passer... mais qui, évidemment, signifie aussi qu'on attend de moi que je preste. Le sport de haut niveau n'est pas un boulot à heures fixes, il faut vraiment s'y investir sept jours sur sept. Concrètement, je m'entraîne deux fois par jour six jours par semaine, mais il y a aussi tout le reste: manger sainement, prendre suffisamment de repos... Si je profitais de mon jour de repos dominical pour aller faire une longue promenade à Bruxelles, mes prestations à l'entraînement du lendemain s'en ressentiraient." Au-delà de l'entraînement, ce sont évidemment surtout les prestations en compétition qui comptent. Ces dernières années, Ben Broeders a été plusieurs fois champion de Belgique de saut à la perche (en intérieur et en extérieur) ; il a aussi amélioré à plusieurs reprises le record de Belgique dans sa discipline, qui s'élève aujourd'hui (depuis le 20 août dernier) à 5,81 mètres. "Ce nouveau record témoigne que je suis en train de reprendre le dessus après une très mauvaise année. Cet hiver, j'ai été victime d'une déchirure des ischio-jambiers puis de plusieurs contractures, ce qui m'a empêché de trouver mon rythme et de me dépasser comme je l'espérais aux Jeux Olympiques de Tokyo. J'ai toutefois encore quelques événements au programme qui devraient me permettre de poursuivre sur ma lancée et, je l'espère, de repartir du bon pied l'année prochaine." En 2022, les temps forts de l'athlétisme seront le championnat du monde en salle à Belgrade et les championnats d'Europe et du monde en extérieur à Munich en Allemagne et à Eugene aux États-Unis. Pour notre compatriote, ce championnat du monde dans l'Oregon devrait être l'occasion de retrouver la ville de sa première expérience internationale en tant que junior, en 2014. "Bien sûr, en tant qu'athlète, on essaie aussi d'en profiter quand on a l'occasion de voyager... mais aucun sportif de haut niveau ne s'offre des excursions avant d'avoir fait ce pour quoi il est venu et livré les meilleures prestations possibles. Prenez le championnat d'Europe pour les moins de 23 ans à Bydgoszcz en Pologne. Les épreuves de saut à la perche étaient prévues à la fin du programme et je n'ai donc vraiment rien pu voir de la ville. À Doha en 2019, par contre, nous avions encore quatre jours après notre compétition pour flâner sur les marchés, découvrir la culture locale et suivre ensemble les prestations du côté féminin. Voyager fait partie du boulot et c'est sympa, mais nous sommes là avant tout pour faire notre travail!" Tokyo aussi a été une déception sur ce plan. "Malheureusement, je n'ai pas atteint le stade de la finale et je n'ai pas eu le droit d'y assister ni de visiter la ville: j'étais prié de quitter le pays dans les 48 heures suivant mon élimination." Pendant combien de temps se voit-il encore pratiquer l'athlétisme? "J'espère tenir encore dix ans. J'aimerais beaucoup participer aux JO de Los Angeles en 2028... et si je peux encore aller à Brisbane en 2032, j'aurai vraiment été jusqu'au bout de ma carrière. Cela dit, mon corps pourrait céder avant, on ne peut jamais prévoir. Sachant que la carrière des perchistes qui tablent surtout sur leur force a tendance à être moins longue que celle de leurs homologues qui privilégient la souplesse, je m'efforce aussi d'affiner mes aptitudes techniques sur ce plan." Rêve-t-il de porter un jour le record de Belgique à six mètres? "Cette barre symbolique, c'est sans doute le rêve de tout athlète..." Concurrents en compétition, les athlètes sont aussi des collègues qui s'entendent plutôt bien, comme l'a encore démontré l'expérience de l'été dernier, lorsque le covid a rendu impossible toute compétition officielle. "Nous avions vraiment envie de nous voir. En définitive, nous avons organisé nous-mêmes des concours en France avec des collègues, histoire d'entretenir notre condition physique. J'ai aussi fait un stage avec l'équipe de Suède." L'occasion, pour Ben Broeders, d'apprendre à connaître la nouvelle étoile de la discipline, le champion olympique suédois et détenteur du record du monde Armand Duplantis. Rattaché au club DCLA de Louvain, Ben Broeders combine aujourd'hui le saut à la perche avec ses études de pharmacie. Pourquoi ce choix, et comment s'y prend-il pour tout gérer au quotidien? "À la base, je ne savais vraiment pas quoi choisir, jusqu'à ce qu'une conférence du Pr Tytgat éveille mon intérêt pour la pharmacie. C'est une belle discipline où aider les autres revêt une importance centrale." Au cours de sa première année d'études (complète), Ben Broeders a malheureusement contracté la mononucléose. "Ça a bousillé mon année, mais j'ai tout de même réussi à me classer pour le championnat du monde junior à Eugene - une expérience tellement positive que j'ai décidé, avec le soutien de mes parents et de la faculté, de scinder mes années de baccalauréat. Par la suite, les choses se sont accélérées et j'ai pu me placer dans tous les championnats importants. Ma 4e place au championnat d'Europe senior, en 2016, m'a permis de décrocher un contrat à mi-temps chez Sport Vlaanderen. Comme j'étais souvent en déplacement pour le sport, scinder mes années d'études était un choix logique." Cela peut sembler surprenant, mais le passage du sport à l'étude ne lui pose pas de problèmes majeurs. "Ce sont deux mondes différents, mais c'est aussi une manière de se changer les idées. Je trouve que c'est une excellente chose de pouvoir stimuler mon esprit en étudiant tout en ayant une activité physique. C'est cette combinaison qui fait que cela peut rouler de part et d'autre... même si j'ai aussi remarqué que, quand je peine d'un côté, cela se ressent aussi de l'autre. Cela dit, les stages de pharmacie que je vais devoir faire prochainement vont marquer un tournant pour moi. Travailler sur le terrain dans une officine, ce n'est pas du tout la même chose que de se plonger dans ses bouquins à la maison." Avec un programme chargé du côté sportif, l'organisation pratique s'annonce un vrai défi. "Je vais devoir en discuter avec la faculté et avec mon maître de stage. Je suis curieux de voir comment cela va se passer, car la formation était jusqu'ici assez théorique et nous n'avons encore guère d'expérience concrète du monde de la pharmacie. En plus, les officines sont toutes différentes et chacun doit un peu trouver celle qui lui correspond. En ce sens, le stage sera pour moi une occasion d'utiliser les connaissances acquises à l'université mais aussi d'apprendre à me connaître, même si l'objectif premier reste évidemment d'aider le patient le mieux possible. Quant à savoir comment je combinerai l'athlétisme et la pharmacie après mes études, l'avenir nous le dira...""