Les nouveaux barèmes de rémunération lancés en 2018 s'avèrent souvent défavorables pour les pharmaciens hospitaliers. Sylvie Demaret, présidente de l'Association francophone des pharmaciens hospitaliers de Belgique, explicite les notions d'IFIC et pointe les incohérences dans le système.
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Un dialogue aurait dû avoir lieu entre les associations professionnelles représentant les pharmaciens hospitaliers puisqu'ils ne sont pas représentés par les syndicats classiques. Les anciens barèmes me semblaient plus cohérents." Or, selon elle, il n'y a pas eu le dialogue souhaité. Malgré un recours au conseil d'État, les choses évoluent peu et les rencontres avec l'asbl IFIC n'ont pas été concluantes. Que revêt la notion de "barème IFIC"? Sylvia Demaret: Le site de l'IFIC indique qu'il s'agit premièrement de revaloriser le personnel et améliorer leurs conditions de travail et deuxièmement d'aligner les barèmes des institutions régionales transférées à la suite de la sixième réforme de l'État sur les barèmes fédéraux des soins de santé. L'idée est noble mais le diable se cache dans le détail. Depuis quand est-il d'application? Dans les hôpitaux privés, depuis 2018. Chaque institution privée devait attribuer une fonction à chaque employé au plus tard pour avril 2018. Ensuite, il y avait la possibilité de recours interne, externe (pour le 15 octobre 2018 au plus tard). Plusieurs pharmaciens ont d'emblée introduit des recours. D'autre professions également. Est-il d'application dans tous les hôpitaux? Est-ce obligatoire pour tous les travailleurs? Si non, quel est l'intérêt de refuser son application? C'est obligatoire à ce jour, uniquement dans les hôpitaux privés. Le barème aurait dû être appliqué dans les hôpitaux publics mais suite aux difficultés rencontrées dans les hôpitaux privés, ils freinent cette application. Au moment de sa mise en application, il n'y avait pas d'obligation absolue. Les travailleurs qui bénéficient d'un ancien régime de barèmes ont pu choisir de garder leur barème initiaux (ce que la majorité à fait). Par contre, c'est obligatoire pour les nouveaux travailleurs ou le personnel qui viendrait à changer d'institution. L'intérêt pour le travailleur de le refuser est lié à la perte financière réelle qu'il subit en passant de son barème actuel au barème IFIC. Nos calculs ont mis en évidence des pertes de 75.000 à 312.000 euros sur une carrière complète! Justement: au niveau du salaire poche, quels sont les avantages et les inconvénients de ce barème? L'avantage théorique que voulait l'IFIC est de permettre la valorisation des responsabilités d'une fonction, plutôt que la reconnaissance d'un diplôme. Cette philosophie est louable mais partout ailleurs, lorsqu'on revoit le niveau d'études et/ou de formation, on réclame et on obtient une revalorisation salariale (exemple: les enseignants, les infirmiers spécialisés,...). En pratique, pour les pharmaciens, la valorisation est nulle. Elle est même inférieure car de nombreuses responsabilités n'ont pas été prises en compte et que le descriptif de fonction proposé par l'IFIC était largement incomplet. Ce descriptif semblait dater des années 90 et ne prenait pas du tout en compte l'ensemble des tâches et responsabilités qui ont été ajoutées par une série d'arrêtés-royaux. Elle ne tient pas compte non plus de la responsabilité civile et pénale propre à notre profession. Y a-t-il des pharmaciens qui, en raison de ce système, n'osent plus se spécialiser en pharmacie hospitalière? Oui, car financièrement, faire huit ans d'études universitaires plus toutes les responsabilités qui ont été ajoutées et ne sont ni reconnues, ni valorisées ni récompensées. A cela s'ajoute le "gap" financier entre les pharmaciens hospitaliers dans l'ancien système de barèmes versus le système IFIC. En plus de cela, on gèle encore le marché de l'emploi d'un métier en pénurie (à ce jour on compte 37 postes CDI ouverts en Région wallonne et Bruxelles, sans compter les demandes de remplacement ou CDD et les besoins croissants liés à la mise en application du nouvel AR). Les pharmaciens hospitaliers n'osent plus postuler du public vers le privé car l'IFIC leur est très défavorable, ni d'un hôpital privé où le pharmacien a pu conserver son barème versus un nouvel emploi dans lequel on lui appliquerait l'IFIC... Les transferts sont plus fréquents du privé vers le public qui n'applique pas encore l'IFIC. Il y a une discrimination entre les pharmaciens du public et du privé ainsi qu'entre les pharmaciens hospitaliers et d'autres professionnels de santé au sein des hôpitaux. Pour l'avenir, on ne sait pas si, pour le public les échelles qui seront appliquées sont les mêmes... Au final, on a abouti à l'inverse de ce que l'IFIC disait souhaiter...