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Si les relations dynamiques entre la nature et la santé font l'objet d'une attention croissante, l'influence de l'environnement bâti et l'importance de la verdure et de l'eau pour la santé sont encore sous-estimés. En novembre dernier, le Conseil supérieur de la santé (CSS) a publié un avis synthétisant les connaissances actuelles sur ce sujet et proposant aux décideurs politiques, aux planificateurs de l'espace et au secteur de la santé des recommandations issues de la médecine, de l'urbanisme et de l'écologie. L'implication précoce de ces acteurs, et celle des habitants, dans la conception de ces espaces est donc essentielle. Les experts réunis par le CSS, le 21 avril dernier, ont souligné l'importance d'une approche globale mais aussi la nécessité d'éduquer et d'informer la population sur cette problématique. Arbres, toits verts, étangs... et tous les organismes vivants qu'ils contiennent ont un effet bénéfique sur la santé physique et mentale. "Ces éléments peuvent contribuer à améliorer la qualité de l'air, à réguler la chaleur et à réduire le bruit, mais aussi à inciter les gens à sortir plus souvent. Ainsi, les éléments verts et bleus de la ville peuvent contribuer indirectement à la bonne santé en stimulant un mode de vie actif, la relaxation et le renforcement de la cohésion sociale, avec tous les avantages que cela implique pour la santé physique et mentale", constate le CSS. "Compte tenu de la complexité des systèmes socio-écologiques urbains, malgré une augmentation rapide du nombre et de la diversité des études scientifiques pertinentes, des incertitudes et des inconnues subsistent dans les connaissances scientifiques sur les interrelations entre la nature et la santé. Par conséquent, il n'y a pas de recette standard sur la meilleure façon dont le vert et le bleu peuvent contribuer à la ville", notent les experts. Le CSS s'est penché sur 3 aspects: environnementaux, sociaux et de santé. "Les effets de la nature sur la santé mentale à court terme sont démontrés, ils le sont moins sur le long terme. Les études sur l'effet de la biodiversité sur le microbiote offrent des perspectives significatives... Les zones vertes et bleues en milieu urbain pourraient participer à la médecine curative et préventive", précise Sophie Vanwambeke (UCLouvain). Quatre hypothèses expliquent les mécanismes en cause. "Selon l'hypothèse de la biophilie, on s'attend à ce que les gens préfèrent et sélectionnent des environnements biologiquement diversifiés et tirent des bénéfices mentaux du contact avec les espaces verts. Autre hypothèse: le microbiote affecte le développement et la fonction de pratiquement tous les systèmes organiques et protège contre les micro-organismes pathogènes et les toxines. Selon l'hypothèse de l'effet de dilution, une grande richesse en espèces vertébrées réduit le risque de maladies infectieuses parce que les agents pathogènes sont 'dilués' parmi un grand nombre d'espèces animales réservoirs. Enfin, les services écosystémiques correspondent aux avantages que les espaces verts naturels et artificiels procurent en termes de santé humaine", indique-t-elle. Comment la nature contribue-t-elle aux soins de santé primaires? Il peut s'agir de prescriptions vertes (prescrire de l'activité physique), de thérapies assistées par la nature (plantes, matières naturelles, environnement) et de soins verts (utilisation d'éléments de la nature par des praticiens formés). Sans oublier la médecine complémentaire et les plantes médicinales. Pourquoi la pratique de la prescription verte reste faible malgré les preuves croissantes des bienfaits des espaces verts sur la santé? Parce qu'il manque une terminologie favorisant la collaboration entre professionnels de la santé et de la nature et parce qu'il faut un changement de comportement de la part des patients et des professionnels de santé pour dépasser le modèle biomédical traditionnel. Autre point d'achoppement: le manque de ressources et de temps pour se former et pour soutenir le patient dans son changement de comportement. Enfin, les essais contrôlés randomisés sont moins réalisables car l'exposition et l'expérience de la nature dépendent beaucoup du contexte: "la validité écologique est donc plus difficile", note le CSS qui recommande entre autres d'inclure la fréquentation de la nature dans la routine (pré)scolaire et professionnelle, de renforcer les initiatives telles que One Health et EcoHealth, d'éduquer et sensibiliser le public à la notion d'espaces urbains verts et bleus...